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Micro européen. Allo Zagreb ? La Croatie, au bord du gouffre ?

Croatie, l'impossible amour de la beauté et du cauchemar.

Article rédigé par franceinfo - Jose Manuel Lamarque
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Zagreb avec une vue de la place Bana Jelacica et de la cathédrale.  (BLOOMBERG / GETTY IMAGES)

Naguère, dans l'Empire austro-hongrois, la Croatie avait connu de belles heures après la chute de l'Empire, pour tomber dans le giron de l'Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale avec un gouvernement collaborationniste. La résistance des partisans croates de Tito contre les nazis a intégré la Croatie dans la Yougoslavie titiste.

Durant 45 ans, Zagreb a été sous les ordres de Belgrade

La chute de la Yougoslavie, et l'arrivée de la guerre des années 90 n'ont pas épargné la Croatie. Attaquée par les forces serbes, les Croates ont vécu de sombres heures durant la guerre de Croatie, les snippers serbes étaient au coeur même de Zagreb, le pays a connu de nombreuses batailles dont l'effroyable siège de Vukovar.

La paix revenue en 1998, et la Croatie enfin indépendante, ce pays prenait le chemin de l'Union européenne. Le 1er juillet 2013, la Croatie devenait membre de l'Union européenne.

A l'image du glagolitique (ancien alphabet slave)

L'alphabet glagolitique est le premier alphabet croate et le plus ancien alphabet slave, dont on dit que Cyrille ou Constantin le Philosophe et son frère Méthode s'inspirèrent de l'alphabet éthiopien. Mais aujourd'hui il est bien difficile de trouver des spécialistes de cet alphabet en Croatie, la mémoire tend ainsi à disparaître. Il en va de même de ce pays qui est cité par Transparency International comme un des états les plus corrompus d'Europe, devant l'Italie !

Les 45 ans de communisme n'ont en rien arrangé les choses, on le voit dans le quotidien croate fait de passivité, d'apathie, d'indifférence ou d'inaction. Aujourd'hui le pays est un doux mélange entre l'héritage communiste qui avait gommé tout sens de volonté personnelle, d'engagement, et la corruption qui a atteint les sphères dirigeantes de la Croatie.

On ne compte plus les scandales comme celui d'Agrokor, le géant agroalimentaire, ou l'achat de chasseurs d'occasion à Israël, arrêté par les Etats-Unis tant l'opacité de cette affaire, une fois de plus, noircissait une bien étrange transaction.

Un pays de carte postale

Quand on évoque la Croatie, c'est tout d'abord de sa côte méditerranéenne dont il s'agit. Les îles et les villes sont un enchantement, une richesse historique et une invitation au voyage. Quant à la qualité de ses vins et de sa gastronomie, c'est une découverte dont il ne faut absolument pas se passer.

Mais l'envers du décor est tout autre. Les ports croates si réputés pour leurs chantiers navals, naguère, sont au bord de la fermeture tant leur gestion est devenue un non-sens. Les entreprises croates tant désirées au début de l'indépendance sont de moins en moins compétitives, le réseau ferroviaire est laissé à l'abandon, à la faveur du lobby des autocars.

On ne compte plus en Croatie la puissance de l'intérêt personnel, surtout celui de la classe dirigeante qui provoque l'exode de la jeunesse et de "l'intelligentsia" croate. D'une population de 4,106 millions d'habitants, la Croatie est passée à environ 3,9 millions d'habitants, soit une hémorragie de 300.000 personnes en moins de deux ans.

La Croatie est au bord du gouffre, tant ses institutions font preuve d'obsolescence. On le note, par exemple, dans le système médical croate dont l'inefficacité est devenue légendaire.

Un sursaut croate ?

Il est vrai que de nombreux observateurs attendent et espèrent un sursaut du peuple croate. C'est la raison pour laquelle Ante Glibota est venu témoigner sur l'état de son pays. Plume et esprit libre, Ante Glibota est un des rares Croates à tirer la sonnette d'alarme.

Bien que fortement dominée par le catholicisme, la Croatie est encore dirigée par un certain nombre de fils et filles de membres influents de l'ancienne Yougoslavie de Tito. Ainsi cet état membre de l'Union européenne est englué dans un système qui mêle corruption et abandon pour l'intérêt national. Il reste à noter que la Croatie est voisine de la Bosnie-Herzégovine dont l'instabilité, ainsi que celle du Kosovo font craindre un embrasement dans la région.

C'est pourquoi, il est urgent que la Croatie retrouve le chemin d'une normalisation et de réformes qui pourront la conduire vers la voie d'un équilibre favorable aux Croates leur permettant d'imaginer un avenir en Croatie, chez eux. Mais il faudra pour cela que les Croates eux-mêmes se décident à assainir ce magnifique pays, étouffé, jour après jour, par l'incapacité et la médiocrité.

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