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Olivier Babeau : "Mon pavé 2018, c'est qu'il faut plus d'opacité dans notre société"

La transparence à tout va n'est pas un idéal selon l'économiste, qui lance son pavé contre cette tendance de plus en plus marquée dans la société.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Olivier Babeau, en août 2017. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Olivier Babeau estime que la transparence à outrance n'est pas positive. L'économiste, président de l'institut Sapiens, développe sa pensée dans son nouveau livre Éloge de l'hypocrisie (Éditions du Cerf) et sur franceinfo.

Olivier de Lagarde : Vous réclamez plus d'opacité, vraiment ?

Olivier Babeau : Oui car on a l'impression que plus rien ne peut aller contre ce dogme qui paraît universel d'une transparence forcément meilleure. Or, il faut que nous recréions de l'opacité dans, par exemple, les domaines de vie privée, des domaines où nous pouvons être différents de ce que nous sommes en public. Ça nous permet d'entretenir cette multiplicité des visages que nous avons et que la société tend à nier au nom de cette transparence.

L'opacité, ce n'est pas le mensonge ?

Non, c'est le fait de pouvoir être dans certaines conditions, différents de ce que nous sommes. C'est le fait d'accepter que dans la réalité, toute existence sociale est une mise en scène. C'est difficile à comprendre dans une société de plus en plus manichéenne, où quelque chose qui est bien doit forcément pouvoir être montré et où ce qui est caché est forcément supposé être honteux. Eh bien non, ce qui est caché, c'est ce qui est aussi personnel. Et c'est ce que nous devons réapprendre à cultiver dans une société qui aimerait faire de nous des êtres de verre. 

Pour les questions de vie privée on vous suit, mais dans la vie politique, publique, est-ce que la transparence n'est pas souhaitable ?

Évidemment, c'est tout à fait légitime. Mais d'un autre côté, il faut qu'on accepte que la politique c'est toujours une mise en scène de soi. L'action politique, c'est un moment où on va essayer de donner un visage cohérent à ce monde, qui est très chaotique, et si on essaye de mettre tout en transparence, on accouche d'une mise en scène encore plus fallacieuse. 

Vous prônez une forme d'hypocrisie... 

Oui, je la défends. Il y a eu une forme d'hypocrisie traditionnelle, dont nous sommes en train de perdre le génie, au profit d'une hypocrisie maline qui, elle, veut tromper, qui dit "moi je suis le seul qui n'est pas hypocrite, moi je suis le seul authentique". Et cette prétention est pire, mille fois pire que cette hypocrisie traditionnelle.

Qu'est-ce qu'on fait des réseaux sociaux ?

Le côté terrible des réseaux sociaux, c'est qu'ils deviennent des tribunaux révolutionnaires ou chaque citoyen devient une sorte de juge qui va vous imposer cette pudibonderie qui se développe. Le côté positif, c'est que vous pouvez donner exactement l'image que vous voulez selon le type de réseau utilisé. 

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