"Pour la France", au nom du frère

"Pour la France" de Rachid Hami

Octobre 2012, Jallal Hami, le frère du réalisateur (Aïssa dans le film), vient d'intégrer la prestigieuse école militaire de Saint-Cyr. Une nuit, lors d'un bizutage aussi cruel et stupide qu'illégal, il se noie dans une eau glacée, en tentant de traverser un étang avec tout son barda sur le dos. Non seulement l'armée ne reconnait pas sa faute, mais refuse pour le garçon, après les avoir promis, les honneurs militaires aux Invalides. Enfin, la "grande muette", surnom mérité pour le coup, fera trainer l'enquête : ce n'est que huit ans plus tard que quelques officiers seront condamnés à des peines légères.

De ces douleurs, de ces injustices, Rachid Hami, ne fait pas un film vengeur, bien au contraire. Il rend hommage à son frère et raconte leur histoire familiale. Dans les années 1990, en Algérie, leur mère est menacée par les islamistes, elle part en France avec ses deux fils. Ensemble, ils partagent la misère, et l'amour de leur terre d'exil. À contre-courant des débats polarisés et stériles, Rachid Hami ose la nuance.

"La grande magie" de Noémie Lvovsky

Le septième long-métrage de la réalisatrice-actrice est librement adapté d'une pièce de l'italien Eduardo De Filippo et nous ramène un siècle en arrière, dans les années 1920 en France, dans un hôtel en bord de la mer. Un magicien et sa troupe y divertissent des clients fortunés qui s'ennuient. Parmi eux, un couple : Charles, surnommé le tyran et joué par Denis Podalydès, et son épouse Marta, incarnée par Judith Chemla. Cette dernière profite du fameux tour de la femme qui disparait pour justement s'échapper, et fuir à la fois la scène, l'hôtel et son mari jaloux. La fugue durera quatre ans.

Malgré quelques soucis de rythme dans sa deuxième partie, La Grande Magie est un film original, charmant, agréable et souvent drôle. Il parvient à rendre hommage à tout un éventail d'arts divers : l'opéra, la magie, le chant, la musique (signée ici du groupe Feu! Chatterton). Les acteurs viennent, pour beaucoup, du théâtre : Laurent Stocker, Noémie Lvovsky elle-même, Judith Chemla, Rebecca Marder, Micha Lescot, Laurent Poitrenaux, Catherine Hiegel, sans oublier un Denis Podalydès en majesté. François Morel et Sergi Lopez sont également de la partie.