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Antonio Pagnotta : "Matsumura est le dernier homme de Fukushima"

Il y a deux ans, le Japon était frappé par un tremblement de terre, suivi d'un accident nucléaire à Fukushima. La catastrophe du 11 mars 2011 a bouleversé les japonais et a changé le regard de tous ceux qui se sont rendus sur place. Antonio Pagnotta a rencontré Naoto Matsumura, un fermier, qui continue à vivre dans la zone interdite.
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10 min
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Les Japonais ont observé une minute de silence ce matin, à
6h46, heure française, en hommage aux quelques 20.000 morts et disparus du
séisme et du tsunami du 11 mars 2011. Une catastrophe suivie de l'accident
nucléaire à Fukushima.

Dans Le dernier homme de Fukushima , aux éditions Don Quichotte,
Antonio Pagnotta nous fait vivre ses rencontres avec Naoto Matsumura, un
fermier qui continue à vivre dans la zone interdite près de la centrale. Toute
la population est partie mais lui a refusé.

"C'est un homme qui aime sa terre, qui arrondit les
fins de mois avec un travail de maçon et le 11 mars, la vie s'écroule autour de
lui. Cet homme encaisse les premières radiations et après un mois sur place on
lui demande d'évacuer
". Mais sa famille lui refuse l'hospitalité car elle
a peur d'être contaminée. Accompagné de sa mère et de
son père, Naoto Matsumura ne trouve pas de refuge. Il décide alors de repartir
chez lui. "Il veut conserver son identité et son
honneur.
"

L'attachement à la terre

Les paysans japonais sont très attachés à la terre. C'est à la fois la tombe de la famille, les amis, l'endroit où l'on est né. Tout se base sur
ce lopin de terre qui les nourrit. Le quitter "c'est une forme de mort
sociale,
" explique Antonio Pagnotta.

Un désert humain

Sans eau courante, sans électricité, Naoto Matsumura est
entouré uniquement par des animaux qu'il nourrit et qu'il aide à survivre. Ce
sont les seuls êtres vivants dans la zone, ils lui permettent de conserver sa
dignité.

Pour se nourrir, il consomme parfois des produits locaux
mais depuis quelques mois, il privilégie les colis que des Japonais lui
envoient. Il mange des nouilles lyophilisées. Ca ne l'empêche pas d'être
contaminé, peu à peu : "Je suis un irradié, dit-il. Je pisse et je chie le
césium. Je dors et je mange dans la radioactivité
."

Le respect des autres

Après être passé pour un fou aux yeux de ses concitoyens,
ces derniers lui montrent maintenant du respect et le considèrent presque comme
un sage. "C'est l'homme qui sauve l'orgueil de sa ville et en quelque
sorte de tout le Japon
", raconte Antonio Pagnotta.

Le portfolio d'Antonio Pagnotta sur Fukushima sur le site de Mediapart

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