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Ségolène Royal a-t-elle raison de dire qu’un ministre tête de liste aux municipales, c’est “du jamais vu” ?

Au moins deux ministres, Edouard Philippe et Gérald Darmanin, seront tête de liste pour les élections municipales du Havre et de Tourcoing en mars prochain. S’ils sont élus, le Premier ministre et le ministre du Budget devront choisir entre le gouvernement et leur mandat de maire. Pour Ségolène Royal, ce genre de situation “n’existe pas, c’est du jamais vu”. C’est faux.

Article rédigé par franceinfo - Juliette Mansour
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Ségolène Royal, 2 février 2020 (CAPTURE D'ECRAN "DIMANCHE EN POLITIQUE" / FRANCE 3)

La décision du chef du gouvernement de se présenter comme tête de liste au Havre et, en cas de victoire, de céder sa place à l’un de ses colistiers, ne plaît pas à Ségolène Royal. Invitée de l’émission Dimanche Politique sur France 3 le 2 février, l’ancienne ministre a vivement critiqué ce choix : “Quand on est tête de liste, en principe c’est pour être maire. Ca n’existe pas, ça ne s’est jamais vu, un ministre en exercice, a fortiori un Premier ministre, qui est tête de liste et qui dit après 'on verra si je suis maire'". La situation d'Edouard Philippe est-elle vraiment inédite ? Non, la Cellule Vrai du Faux vous explique pourquoi.

Une pratique très répandue lors des municipales

Il n’est pas rare qu’un ministre se présente comme tête de liste et ne siège pas une fois élu. Aux dernières élections municipales, en 2014, c’était le cas du socialiste Frédéric Cuvillier. Réélu à la mairie de Boulogne-sur-mer, le ministre de l’Agriculture avait préféré céder sa place à un adjoint. En 2008, alors que François Fillon était à la tête du gouvernement, plusieurs de ses ministres se présentaient déjà comme tête de liste. Michèle Alliot-Marie avait ainsi tenté sa chance à Saint-Jean-de-Luz, Xavier Darcos à Périgueux, Hervé Morin dans l'Eure ou encore Eric Woerth à Chantilly.

Et on peut même remonter jusqu’aux élections municipales de 2001. A l’époque, 28 membres du gouvernement s’étaient lancés dans la campagne en tant que têtes de liste. Michel Sapin, alors ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l’Etat, était parti à la conquête d’Argenton-sur-Creuse, Elisabeth Guigou, ministre de l’Emploi, visait  Avignon, tandis que Pierre Moscovici, ministre délégué aux Affaires Européennes, espérait séduire les électeurs du Doux, tout comme Jack Lang à Blois. Tous sans succès. A Morlaix, Marilyse Lebranchu est en revanche élue maire... mais elle laisse sa place pour rester ministre de l'Emploi. Un ministère auquel était rattachée celle qui était alors ministre déléguée à la Famille... Ségolène Royal.

Pas de règles strictes mais une tradition

Si la loi interdit aux députés ou aux sénateurs de cumuler leur siège avec un mandat local, il n'y pas d'interdiction pour les ministres. Pour autant, une règle ancienne, initiée en 1997 sous le gouvernement de Lionel Jospin, et quasi toujours respectée depuis, oblige les ministres élus aux municipales à choisir l'un des deux postes.

En 2012, le président François Hollande l’a même formalisée dans sa “charte de déontologie des membres du Gouvernement”. Et après son élection en 2017, Emmanuel Macron a exigé de ses ministres qu’ils démissionnent de leurs fonctions exécutives locales. Une consigne pas toujours respectée : Jean-Yves Le Drian était ainsi resté ministre de la Défense et président de la région Bretagne pendant deux ans.

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