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Le vrai du faux. Y a-t-il vraiment du bambou dans les steaks hachés, comme l'affirme la présidente de la FNSEA ?

Christiane Lambert a déclaré sur BFMTV que certains steaks hachés vendus par Carrefour contenaient 15% de fibres de bambou.

Article rédigé par franceinfo - Armêl Balagog et Caroline Félix
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, le 10 août 2022.  (MATHIEU PATTIER / MAXPPP)

Alors que le salon de l'agriculture bat son plein, la présidente de la FNSEA Christiane Lambert a dénoncé la présence de fibres végétales dans les steaks hachés vendus par les supermarchés Carrefour. "Le steak haché où il y a 15 % de fibres de bambou, vous croyez que c'est bon pour l'alimentation ?, a-t-elle lancé sur BFMTV et RMC, vendredi 24 février. C'était à Carrefour. Ils l'appellent steak haché, mais il y a une partie qui n'est pas de viande. C'est une façon de tromper le consommateur." Christiane Lambert dit vrai, malgré quelques approximations.

2% à 4% de bambou dans certains produits

D'abord, oui, il y a bien des fibres de bambou dans certains produits, présentés comme des steaks hachés, vendus sur le site du distributeur Carrefour. Mais ce que Christiane Lambert ne dit pas, c'est qu'il y en a aussi sur les sites d'Intermarché ou de Cora. Ce sont à la fois des produits de la marque des distributeurs, mais aussi des très connues telles que Charal, Tendre et plus ou Socopa. Ils sont vendus moins cher que les steaks 100% pur bœuf.

Néanmoins, l'agricultrice exagère un peu quant à leur composition. Les produits frais contiennent entre 75% et 80% de viande, mais le reste n'est pas entièrement du bambou. La proportion de ces fibres végétales est entre 2% et 4%, selon les marques.

Sur son site internet, Socopa assume et explique que "les fibres végétales présentes dans [ses] hachés ont pour but de maintenir l’humidité présente naturellement dans la viande, afin que le haché garde tout son moelleux et sa saveur lors de la cuisson. Elles apportent un vrai bénéfice gustatif au produit notamment dans le cas d’une cuisson à point ou bien cuit, qui a tendance à assécher la viande".

Ca ne s'appelle pas des "steaks hachés"

La présence de ces fibres végétales est parfaitement légale. Il est aussi possible d'y mettre de la poudre de pois ou de la poudre de betterave pour renforcer la couleur rouge de la viande. Dans les surgelés, on retrouve d'ailleurs davantage de protéines de soja réhydratées que de bambou. Quand il n'y a que 51% de viande, la part de soja peut monter jusqu'à 24%.

En revanche, ce qui n'est pas légal, c'est d'appeler cela des "steaks hachés" ou de la "viande hachée". Les normes sanitaires (Afnor NF V46-002 du 20 décembre 1989) définissent clairement les choses : s'il y a entre 51% et 99% de viande dans la composition, il faut parler de "préparation de viande hachée", s'il y a moins de 51% de viande, alors ce sont des "préparations à base de viande hachée". Des appellations un peu techniques et pas très vendeuses, auxquelles les marques préfèrent de nouveaux noms tels que "Le classique", "L'extra moelleux", "Happy Family" ou tout simplement "Haché".

Des emballages trompeurs

Mais ce qui est d'autant plus trompeur, c'est que ces produits et leurs emballages ressemblent trait pour trait à des steaks hachés. Dans les rayons des supermarchés, ils sont vendus les uns à côté des autres. Les "préparations de viande hachée" et "préparations à base de viande hachée" ont quasiment les mêmes emballages que les "steaks hachés", recouverts de photos de ce qui a tout l'air d'être un steak haché. Si on n'est pas assez attentifs aux ingrédients écrits au dos des paquets, on a vite fait de se tromper. Ce qui peut poser problème aux personnes allergiques, notamment, qui peuvent faire une réaction au bambou.

Par ailleurs, le fait qu'il y ait moins de viande dans ces produits, sans aucune compensation, signifie aussi qu'il y a moins d'apports nutritifs. Marie-Pierre Elliès, chercheure à l'Inrae et professeure à Bordeaux Sciences Agro, a expliqué à franceinfo que le bambou ne contenait que 2% de protéines, pas de fer ni de vitamine B12. Alors que c'est ce que les consommateurs viennent chercher dans le bœuf.

Mais ce que souhaite dénoncer la présidente de la FNSEA, surtout, c'est que si ces produits contiennent moins de viande, cela signifie que leurs fabricants ont diminué les coûts de production en achetant moins de bœuf, un manque à gagner pour les éleveurs.

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