Le vrai du faux. "L'écrasante majorité des mineurs condamnés ne récidive pas"
Jean-Jacques Urvoas affirme que les sanctions contre les mineurs sont efficaces contre la récidive. Mais le ministre de la Justice va un peu trop loin dans sa déclaration.
En plein mouvement de colère des policiers et alors qu'une partie de l'opposition dénonce le laxisme supposé des magistrats, voilà ce qu'affirme le ministre Jean-Jacques Urvoas sur BFM mercredi 26 octobre :
"L'année dernière, il y a eu 55700 condamnations de mineurs. L'écrasante majorité de ces 55700 condamnations de l'année dernière ne sont récidiveront pas. Parce que, justement, la sanction a cette dimension pédagogique."
L'écrasante majorité des mineurs ne récidive pas ?
Le site du ministère de la Justice est catégorique dans son "vrai/faux" sur la Justice des mineurs : "Dans 65% des cas, le jeune mis en cause n'aura plus affaire à la justice avant ses 18 ans".
Premier problème : Jean-Jacques Urvoas ne parle pas de "jeunes mis en cause" mais de "mineurs condamnés". Et cette différence sémantique n'est pas anodine.
Ce chiffre de "65% de non-récidivistes avant 18 ans" concerne l'ensemble des mineurs impliqués dans une affaire (selon une étude publiée en 2012). Or l'an dernier, les parquets ont traité 165000 affaires, dont 129500 poursuivables. Et au final, une grande partie de ces jeunes "mis en cause" ne sont finalement pas poursuivis et font l'objet de procédures alternatives commme des rappels à la loi.
Mais Jean-Jacques Urvoas parle donc uniquement des "mineurs condamnés". Le chiffre de "55700" avancé par le ministre, c'est en fait l'ensemble des "mesures et sanctions prises" par les juges et les tribunaux pour enfants l'an dernier. Il s'agit, la plupart du temps, d'admonestation, de dispense de peine, de liberté surveillée ou encore de placement. Autant de sanctions qui font l'objet d'une inscription sur le casier judiciaire.
Plus de la moitié des mineurs condamnés récidivent
Un mineur sur cinq condamné pour la première fois en 2007 a récidivé dans les cinq ans qui ont suivi... avant sa majorité. Mais si l'on regarde au-delà de la barrière des 18 ans, le taux de récidive grimpe à près de 60%. En clair : plus de la moitié des condamnés récidivent dans les cinq ans.
La différence du taux de récidive avant et après la majorité s'explique en grande partie par le fait que la plupart des mineurs concernés avaient entre 16 et 18 ans au moment de leur condamnation. Bref, mesurer la récidive dans les 5 ans après une condamnation en se limitant à la minorité est un calcul "tronqué" et "il est donc nécessaire de regarder par-delà la frontière des 18 ans", explique note une étude du ministère de la Justice.
Plus la Justice condamne tôt, plus la récidive est forte
C'est l'un des enseignements de l'étude publiée par l'Insee : La récidive plus fréquente et plus rapide chez les jeunes condamnés. Après avoir étudié le parcours de l'ensemble des condamnés en 2004 pour un délit ou une contravention "grave", l'auteur explique que l'âge joue un rôle majeur dans la récidive :
"Plus le condamné est jeune au moment des faits, plus son risque de récidiver dans les 8 ans qui suivent sa condamnation est élevé ; un condamné qui était mineur lors de l’infraction initiale a 1,6 fois plus de risques de récidiver qu’un condamné âgé de 18 à 25 ans et 2,3 fois plus qu’un condamné ayant entre 30 et 39 ans."
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