Affaire Cahuzac : Bernard Accoyer dit-il vrai sur l'absence de contrôle fiscal ?
Vrai.
Le
gouvernement, ou plutôt les gouvernements, n'ont jamais lancé de contrôle
fiscal. Pourtant, dès 2008 — on est sous la droite — un agent des impôts signe une note
réclamant "un examen approfondi de la situation fiscale" de monsieur
Cahuzac : l'agent suspecte une fraude.
Sa demande restera lettre morte. Mieux : il
sera sanctionné pour être allé fouiner "sans raison apparente."
Mais le plus important, finalement,
est de savoir si une enquête fiscale basique, "normale" si j'ose
dire, aurait permis de vérifier, de prouver, l'existence, présente ou passée,
d'un compte en Suisse ou en Asie. Rien n'est moins sûr avec ce pays qui continue à pratiquer le secret bancaire. "La Suisse est réputée pour abriter des sommes issues de la fraude fiscale. La France a beaucoup mal à recevoir des informations en provenance de Suisse. Et pendant de longues années, il n'y a pas eu d'informations du tout", explique Vincent Drezet
du syndicat Solidaires-Finances publiques.
Convention d'entraide fiscale
Mais depuis novembre 2010, une convention d'entraide fiscale lie Paris et Genève. Les choses ont-elles changé depuis ? Sur "plusieurs demandes d'informations, la Suisse n'a répondu que dans un tiers des cas. Pire, toutes les réponses ne sont pas véritablement exploitables", poursuit le représentant syndical des services fiscaux.
Une demande
d'entraide, certes tardive, est pourtant lancée le 24 janvier dernier par le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici — cela fait près
de deux mois que Jérôme Cahuzac jure ses grands dieux n'avoir jamais eu de
compte en Suisse. Le parquet de Paris a ouvert quinze jours plus tôt une enquête
préliminaire pour "blanchiment de fraude fiscale".
"J'ai
joué mon rôle avec les outils qui étaient les miens", se défend aujourd'hui
Pierre Moscovici. Mais sa demande d'entraide porte sur la seule banque UBS. Et
sur la seule période 2006-2013. Mediapart et le fameux inspecteur du fisc révélaient
pourtant que l'ouverture du compte remontait au début des années 90, quand Jérôme
Cahuzac était conseiller au ministère de la Santé.
16 milliards d'euros récupérés
Depuis, selon
la presse helvète qui s'appuie sur des éléments de la justice suisse, l'argent
avait circulé de compte en compte. Et en 2006, cela faisait belle lurette qu'il
ne se trouvait plus chez UBS, mais dans une banque plus... discrète.
Une demande
d'entraide trop restrictive, une réponse négative et, durant un temps, Jérôme
Cahuzac a donc pu continuer à mentir, les yeux dans les yeux.
La lutte contre la fraude fiscale permet de faire rentrer dans les caisses de l'Etat chaque année 16 milliards d'euros : 12 à 13 milliards d'impôts non payés, et 3 milliards de pénalités.
Il y a en France quelque 5.000 vérificateurs sur le terrain, qui vont sur le terrain éplucher les comptes des entreprises et des particuliers, et de nombreux agents des finances qui "redressent" les resquilleurs directement depuis leur bureau. Plusieurs centaines de milliers de redressements fiscaux sont effectués chaque année.
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