Cet article date de plus d'onze ans.

Voyage dans la base arrière de la Syrie au Liban

La région du Hermel est frontalière de la Syrie. Située au nord de la vallée de la Békaa, sur les contreforts du Mont Liban,c'est l'une des plus belles régions du Liban. C'est aussi une région totalement contrôlée par le Hezbollah, l'un des principaux alliés de Damas dont le chef Hassan Nasrallah a récemment admis une implication directe de sa branche armée auprès des soldats de Bachar el Assad.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
  (©)

Près de la ville de Qasr, on est au plus près de la frontière syrienne. Le propriétaire d'une maison me
montre depuis son toit le paysage qui s'offre à nous. " Juste là, derrière les arbres, on est déjà en Syrie. On
est à 100 mètres de la Syrie"
, dit-il.

Il y a des vaches qui paissent dans des champs, une retenue d'eau juste devant nous et un
petit poste frontière syrien avec le drapeau national et ses deux étoiles. En
revanche, pas de poste frontière libanais. L'armée libanaise est absente. Ici,
on est sur le territoire du Hezbollah, le parti d'Hassan Nasrallah, que l'on
décrit comme un état dans l'état.

Les drapeaux du
Hezbollah flottent à Qasr ou Hermel

Tous les habitants de la région sont acquis à sa cause.
Dans les villes comme Qasr ou Hermel, on peut voir flotter les drapeaux du
Hezbollah jaune et vert et parfois, plus
discrets, des portraits de Bachar el Assad affichés dans les boutiques, ou des
photos du président iranien Ahmadinejad. Le Hezbollah, on le sait, est proche de
l'Iran dont il reçoit son financement.

Le chef  du parti
de Dieu, Hassan Nasrallah, a reconnu que des hommes du Hezbollah combattaient dans
la région de Qousseir qui se trouve à 15 km seulement de la frontière libanaise
et à 35 kilomètres de Homs, la 3e ville de Syrie. Il y a un an, la
ville de Qousseir est tombée aux mains des rebelles. Depuis le régime de Damas
s'est fixé comme objectif d'en reprendre le contrôle avec l'appui des
combattants du Hezbollah.

Abou Ali est libanais et agriculteur. Il possède 100
hectares de terre, côté syrien, héritage du découpage des frontières au début du XXe siècle. Abou Ali a 46 ans. C'est un musulman chiite. Il cultive
du blé sur ses terres et élèves des vaches et des chèvres. Mais il y a huit mois,
il affirme que des combattants de l'opposition syrienne sont venus s'installer
sur une partie de son terrain. Depuis il
a décidé de prendre les armes pour défendre sa terre contre, dit-il, les "terroristes", terme également utilisé par le régime syrien pour désigner les
rebelles.

"Notre armement est très simple, moi, je n'ai qu'un
kalachnikov. C'est tout"

Abou Ali montre son uniforme, un treillis. " Nous avons dû unifier nos uniformes parce qu'avant, les terroristes venaient en civil et s'infiltraient parmi nous. Maintenant on a tous le même uniforme.
Personne ne peut rentrer dans notre région sans cet uniforme. On peut se
reconnaître les uns les autres... 
Notre armement est très simple, moi, je n'ai qu'un
kalachnikov. C'est tout."
  Abou Ali appartient à l'un des comités populaires qui
sont en fait des milices formées dans les 13 villages syriens frontaliers du
Liban.

Un autre homme au visage buriné accepte de parler.
Son fils de 19 ans a été tué il y a 3 semaines dans une embuscade. " Mon fils faisait partie d'un comité populaire et il
défendait notre terre. C'est comme ça qu'il est mort"
... Est-ce qu'il était proche du Hezbollah ? " Non. Nous on vit en Syrie, nos terres sont en Syrie, on
n'a rien à voir avec le Hezbollah."

Ici personne ne veut reconnaître officiellement
l'implication du Hezbollah. Pourtant, nous avons croisé des pick-up avec, à
l'intérieur des hommes en treillis qui revenaient  de Syrie ou qui s'y rendaient. Le lendemain
de ce reportage, des combats ont eu lieu autour du Qousseir entre des rebelles
syriens et l'armée de Bachar el Assad épaulée, selon les opposants, par le
Hezbollah.

"5.000 combattants du Hezbollah dans toute la
Syrie"?

On ignore combien de combattants du Hezbollah se battent
actuellement aux cotés de l'armée syrienne.  Leur nombre est tenu secret. Mais pour le
sociologue libanais Waddah Charara, spécialiste du Hezbollah et auteur d'un
livre référence sur le parti de Dieu (L'état Hezbollah ), il se compte par
centaines. " J'ai avancé le chiffre de 1.200 en parlant d'une
garnison qui est stationnée dans la plaine de Homs. Ce chiffre a diminué à 500
combattants mais qui peut remonter. Ca dépend des visées du commandement syrien,
en accord total ou partiel avec le commandement du Hezbollah. Les Américains
considèrent qu'il y a à peu près 5.000 combattants du Hezbollah dans toute la
Syrie".

D'autres sources américaines parlent de 10.000
combattants. Mais il est impossible de le vérifier. Il peut s'agir d'une
exagération volontaire, d'autant que les Américains continuent de considérer le
Hezbollah comme une organisation terroriste.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.