Vers la fin du camping à l'année : des milliers de Français inquiets
La vie au camping n'est pas toujours synonyme de vacances, loisirs et
détente. Le camping à la ferme de Boissy-sous-saint-Yon dans l'Essonne
en est la preuve. La plupart des occupants sont là, dans leurs
caravanes, du lundi au vendredi, le temps de leur semaine de travail en
région parisienne. Ce sont souvent des ouvriers qui rentrent en région
dans leur famille le week-end. Mais de plus en plus, le propriétaire est
aussi sollicité pour accueillir sur son terrain des familles, de jeunes
apprentis, ou des quinquagénaires pour qui le camping est une vraie
solution de logement.
"J'ai environ un coup de téléphone par semaine
de personnes qui se trouvent dans la précarité. Elles ont été expulsées
ou bien n'ont plus de quoi payer leur loyer dans le parc privé. Leurs
demandes de HLM sont refusées ou en attente. Ces personnes n'ont alors
pas le choix : plutôt que de finir par dormir dans leur voiture ou sous
les ponts, elles optent pour la solution "caravane" ou "mobile home", un
moindre mal pour elles " raconte Raymond proriétaire depuis 25 ans
de ce camping. Raymond a un grand coeur. Souvent il ferme les yeux sur
les factures impayées de ces occupants en grande difficulté. Mais
d'autres propriétaires de camping seraient bien moins généreux. Certains
profiteraient du fait que la demande est de de plus en plus importante,
pour imposer des loyers surévalués.
Pour Maurice, 58 ans, la vie
au camping dure ainsi depuis 3 ans. "J'ai un micro-onde pour des repas
chauds, les douches et les commodités à quelques mètres de ma caravane,
un chauffage d'appoint électrique, c'est pas formidable mais étant donné
ma situation financière, je n'ai pas le choix " raconte-t-il. Maurice
est chauffeur routier. A cause d'un grave problème à la jambe, il a été
déclaré inapte. La sécurité sociale lui verse quelques centaines d'euros
chaque mois. Assez pour se payer une location de 220 euros par mois
charges comprises au camping, mais pas assez pour prendre un
appartement. Les loyers sont devenus inaccessibles pour lui. Même un
studio cela lui couterait les deux tiers de ses revenus. Inimaginable !
Ils
seraient donc plusieurs dizaines de millliers comme Maurice à ainsi
vivre à l'année dans des campings par nécessité. Mais pour le député UMP
Jean-Louis Léonard, auteur de la loi votée en novembre à l'Assemblée,
"ces chiffres sont erronnés ". "Les personnes qui vivent ainsi dans des
caravanes ou des mobile home par nécessité sont des exceptions. Les
autres le sont par choix " explique le parlementaire pour qui "un camping
ne doit pas être un habitat permanent ". "Les maires ont un vrai souci
aujourd'hui. Certains parcs résidentiels de loisirs n'ont plus de
loisirs que le nom, et sont devenus des repères de vieux mobile home dans
lesquels des personnes se sont installées illégallement dans des
conditions souvent inacceptables. Cela s'apparente à des bidonvilles. On
ne peut pas laisser faire cela plus longtemps " ajoute Jean-Louis Léonard.
Des propos qui ulcèrent les associations de lutte contre la
pauvreté. Elles dénoncent une chasse aux pauvres et une méconnaissance
grave de la situation du logement et du mal logement en France. "Quand
on a des loyers qui augmentent de 50 % en 10 ans, et des charges qui
explosent, on a des personnes à tous petits revenus qui sont renvoyées
vers de mauvaises solutions. C'est vrai le camping est une mauvaise
solution, mais c'est toujours mieux que la rue. Alors oui c'est triste
de constater que les campings sont devenus un amortisseur de la crise.
Mais croit-on qu'on va régler les choses en expulsant ces campeurs à
l'année? Non au contraire on va les pousser à migrer vers des terrains
vagues ou sous les ponts. Ce qu'il faudrait ce sont de vraies solutions
de relogement. Et sur ca, la proposition de loi UMP ne dit rien "
s'insurge Christophe Robert, le délégué général adjoint de la fondation
Abbé Pierre.
A l'Assemblée en novembre, cette loi sur les campings a
été votée à l'unanimité, avec les voix de la gauche donc. Mais les
députés PS n'auraient pas saisi tous les aspects du texte. "Ils seraient
passés à travers " commente le sénateur PS Thierry Repentin, conseiller
de François Hollande sur les questions de logement. "Si comme prévu le
texte est présenté dans les prochaines semaines au Sénat, nous devrions
reprendre la main et empêcher qu'il ne soit au final adopté " conclut-il.
Les associations l'espèrent très fort.
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