Gardes d'enfants : une clandestinité très répandue
Le travail clandestin est très répandu, chez les nounous et assistantes maternelles. Elles ne montent pas toutes pour autant une crèche illégale sur le modèle de celles démantelées à Marseille, cet été – deux crèches sauvages repérées aux domiciles de deux nounous, qui gardaient chacune une vingtaine d'enfants.
Ces deux affaires-là sont tout à fait exceptionnelles. Mais une clandestinité très banale et très ordinaire est installée un peu partout en France. Dans sa maison, au bord d'une petite rivière, cette assistante maternelle agréée l'avoue. Comme beaucoup d'autres, elle garde un peu plus d'enfants qu'elle n'en a le droit. "Légalement, j'ai le droit d'en garder quatre. Mais j'en ai eu jusqu'à six", dit-elle. "Mais le surplus, ce sont toujours les enfants scolarisés, et que je n'ai que le midi. C'est pas catastrophique" , assure-t-elle. Elle concède : "Je reconnais que je risque de perdre mon travail, mais vous savez, il y en a tellement qui travaillent au black et qui en ont huit ou dix..."
Huit enfants chaque midi
Huit. C'est le nombre d'enfants qu'accueille chaque midi une dame qui est devenue nounou par "bonté", selon une jeune mère de famille qui lui confie elle-même ses enfants, clandestinement. La jeune maman se justifie :"dans notre école, à la campagne, il n'y a pas de cantine ; sinon, ma seule autre solution serait de déscolariser mes enfants, ou de les mettre dans le privé, ou alors d'arrêter de travailler" . Elle précise qu'elle paie cette "nounou" totalement illégale, six euros par jour pour garder et nourrir ses enfants à l'heure des repas.
A l'Union Fédérale Nationale des Associations de Familles d'Accueil et Assistantes Maternelles, on estime que la crise est aussi une des raisons qui poussent parents et nourrices à accepter la garde d'enfants illégalement. Parce que les parents n'ont pas toujours les moyens de payer une nourrice, qui se monnaye entre 400 euros à la campagne et plus de 1.100 à Paris.
Et aussi parce que les nounous désoeuvrées acceptent à tout prix les conditions des parents. Des parents qu'il faut comprendre dit Alain Feretti, de l'Union Nationale des Associations Familiales, et par ailleurs administrateur à la Caisse Nationale des Allocations Familiales. "On peut difficilement condamner les familles car souvent, l'absence de solution d'accueil pour son enfant est un des premiers obstacles à l'emploi. Pour nous, c'est plus aux pouvoirs publics d'agir" . Il manque selon lui 350 000 à 400 000 places d'accueil pour garder des enfants. "Sans quoi, dit-il, les systèmes parallèles qui mettent potentiellement en danger des enfants ne pourront que se développer".
Des sanctions lourdes pour les parents
Pourtant, Jean-Michel Guérra, l'un des responsables de l'ACOSS, la Caisse Nationale des URSSAF a du mal à concevoir cette illégalité. Car les parents dit-il "peuvent très facilement déclarer leurs nounous et être gagnants avec la PAJE, la Prestation d'Accueil du Jeune Enfant".
Les parents risquent gros, pour travail dissimulé. Les peines encourues vont de 45 000 euros d'amende à trois ans de prison dans les cas les plus graves. Quant aux nounous non déclarées, elles sont tout simplement précaires, sans réelle couverture sociale ni droits à la retraite...
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