Familles homoparentales : paroles d'enfants
Leurs témoignages sont aussi variés que leurs situations
familiales. Il n'y a pas une, mais bien une multitude de configurations de
familles homoparentales.
Alexi, 10 ans, a grandi avec son petit frère et ses deux
mamans dans une banlieue parisienne cossue. Tous deux sont nés d'une
insémination artificielle avec le même donneur, un ami qui assume pleinement
son rôle paternel. Alexi a donc un papa qu'il voit un week-end sur deux et tous
les jeudis.
La configuration de sa famille ne semble pas troubler outre
mesure ce garçon longiligne, blond, qui effectue sa dernière année à l'école
primaire. Il y voit même des avantages pratiques : "Au moins je ne
déjeune jamais à la cantine, pas comme mon ami Maël dont les parents sont
divorcés. Et puis moi au moins j'ai une plus grande famille ! ", affirme
dans un large sourire Alexi.
"Parfois je me demande ce que ça ferait
d'avoir un papa " (Assia)
Assia, elle, se pose davantage de questions sur sa
situation. A peine plus âgée qu'Alexi, cette petite brune aux yeux pétillants
vit dans un village ardéchois avec ses deux mamans. Conçue en Belgique par
insémination artificielle avec donneur anonyme, Assia s'interroge sur ce père
biologique qu'elle ne connaît pas : "Parfois je me demande ce que ça
fait d'avoir un papa. Pas toujours mais parfois. Il pourrait m'apprendre des
choses... Mais bon ", enchaine la jeune fille, "il faut bien que je me
fasse à son absence !!! "
Depuis qu'elle est au collège Assia se heurte à
l'incompréhension voire aux critiques de certains élèves et professeurs sur sa
situation familiale. Cela la rend parfois malheureuse, avoue-t-elle. L'an dernier,
elle a demandé à voir un psychologue.
Le regard des autres
C'est le point commun que l'on a constaté chez ces enfants,
ils souffrent souvent du regard des autres. Ce n'est pas l'orientation sexuelle
de leurs parents qui les dérange mais bel et bien les critiques de certains,
souvent au moment de la pré-adolescence.
Aude, aujourd'hui maman, avoue en avoir souffert. Ses parents
ont divorcé quand elle avait 12 ans, sa mère s'est installée avec une femme.
Collégienne dans la banlieue lyonnaise, cette cadre âgée aujourd'hui de 32 ans
avoue avoir eu le sentiment d'être jugée : "Il m'est déjà arrivée
d'être laissée sur le trottoir à la sortie de l'école par des parents, au cours
d'accompagnements groupés, juste à cause de la situation de ma mère ! Je
pouvais également faire l'objet de moqueries de certains de mes camarades de
classe ", poursuit la jeune femme. "On disait par exemple que je
n'aurai pas de bons résultats scolaires à cause de cela. Ça a été très pénible ", soupire Aude.
Pour justement éviter "ce regard des autres ",
Alexandre a eu la consigne de ne pas parler de l'homosexualité de son père qui
n'a d'ailleurs jamais quitté le foyer familial. Aujourd'hui âgé de 37 ans, ce
père de trois enfants avoue avoir mal vécu le poids de ce secret. Il l'a
d'ailleurs a brisé à l'occasion des débats sur le projet de loi : "C'est
finalement ce poids qui m'a le plus pesé, beaucoup plus que la sexualité de mon
père elle-même ", indique Alexandre.
"Comme si on vivait dans la clandestinité" (Modelène)
Un père qui en a toujours eu honte. C'est
la raison pour laquelle ce trentenaire soutient ce projet de loi : pour donner
de la visibilité à ces familles et une légitimité aux enfants. Il a crée
récemment la première association d'enfants de parents homosexuels basée à
Lyon : decla.
Modelène aussi est
favorable à ce texte. Cette étudiante de 18 ans, adoptée par l'une de ses mères
en Haiti s'est toujours bien sentie dans sa famille pourtant si particulière.
En revanche vivre dans l'ombre lui a pesé : "C'est comme si on
vivait dans la clandestinité. Mon autre maman n'est pas reconnue aux yeux de la
loi. C'est très compliqué à gérer dans la vie quotidienne. Avec cette loi, on a
le sentiment d'être considéré ! "
A lire, dans ce contexte : la définition du mot "père" dans le "Dictionnaire des écoliers" (source : ministère de l'Education nationale)
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