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L'ONU alerte contre la recrudescence de faux médicaments au Sahel

Dans un rapport, l'ONU alerte sur ce trafic, qui n'est pas nouveau mais qui ne cesse de se développer.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Des médicaments contrefaits. Image d'illustration. (JEAN-MARC LOOS / MAXPPP)

Le rapport de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime, publié mardi 31 janvier, cible particulièrement les pays du Sahel : Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Niger et Tchad. Sa conclusion est sans appel : dans ces cinq pays, des quantités inimaginables de médicaments sont soient falsifiés, soit de qualité inférieure parce qu'ils ont été stockés dans de mauvaises conditions ou qu'ils sont périmés... Ils peuvent représenter jusqu'à la moitié des produits en circulation.

Et le pire, c'est qu'une partie d'entre eux (environ 40%) ont intégré la chaîne d'approvisionnement légal : on les trouve dans les pharmacies.

Pourquoi une telle situation ? D'abord, les pays du Sahel, qui n'ont pas d'industrie pharmaceutique développée, importent jusqu'à 90% de leurs médicaments, essentiellement d'Europe et dans une moindre mesure de Chine et d'Inde. Les stocks légaux et illégaux arrivent par les ports du littoral, Guinée, Ghana, Bénin ou Nigeria et sont ensuite acheminés au Sahel.

Un phénomène aggravé par la corruption

Le circuit formel, de toute façon, ne suffit pas à répondre à la demande, qui est très forte en raison des nombreuses maladies infectieuses comme le paludisme. D'autre part, tous les habitants n'ont soit pas d'accès aux soins en zone rurale, soit pas les moyens de les payer, ils se fournissent donc massivement sur le marché informel. La corruption fait le reste. Et ce sont moins les groupes armés que les employés de firmes pharmaceutiques, les agents des douanes ou les vendeurs de rue qui par opportunisme alimentent ce trafic : ils s'appuient parfois sur la diaspora qui les fournit en produits illicites, ils les font entrer et les revendent sur le marché informel.

Avec des conséquences parfois dramatiques : au mieux, ces médicaments sont inefficaces, au pire, ils sont mortels. Les plus falsifiés sont les antipaludéens. En Afrique subsaharienne, l'OMS estime qu'ils sont responsables de la mort d'au moins 72 000 personnes chaque année. Il y a cinq ans, c'était 64 000. Les antidouleurs sont aussi en tête du palmarès. Toujours selon l'OMS, les antibiotiques défaillants utilisés pour soigner les pneumonies chez les enfants ont entraîné près de 170 000 décès par an.

On peut aussi parler des vaccins contre la méningite. Quand le Niger a du faire face à d'importantes épidémies en 2015, en 2017 et en 2019, il s'est tourné vers les grossistes des pays voisins ; à chaque fois des vaccins falsifiés sont arrivés sur le marché. Les étiquettes étaient parfaitement bien imitées, seulement, il leur manquait certains antigènes. Or, les traitements non-efficaces ont plusieurs conséquences : d'abord, ils coûtent cher, puisqu'il faut prendre en charge les personnes parfois rendues malades par les faux médicaments. Mais ils entraînent aussi une perte de confiance dans le système de santé et le gouvernement. L'ONU réclame des lois plus efficaces, des sanctions plus lourdes et une meilleure coordination internationale.

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