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Comédie musicale : "C'est un personnage qui est tellement loin de moi que je suis obligé de composer, de trouver des failles, des fragilités", confie Roberto Alagna qui incarne Al Capone

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le ténor franco-italien, Roberto Alagna. À partir du 28 janvier 2023, il sera sur la scène des Folies Bergère à Paris dans la comédie musicale : "Al Capone".
Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 272 min
Roberto Alagna (à droite) incarne le gangster de Chicago, Al Capone, au côté d'Anggun et de Bruno Pelletier, sur la scène des Folies Bergère à Paris. (FRED DUGIT / MAXPPP)

Roberto Alagna est un ténor franco-italien. Il a toujours eu deux passions, l'opéra et la chanson française. D'ailleurs, il a dédié un disque très intimiste, Le chanteur, à la chanson française, afin de rappeler qu'avant de faire de l'opéra, il chantait d'abord dans les cabarets. Le petit garçon qu'il était, fils d'un maçon et d'une couturière, est devenu Il Magnifico au fil du temps, plébiscité dans le monde entier, à New York, à la Scala de Milan, en passant par Vienne, à l'Opéra Bastille. À partir du 28 janvier, il sera sur la scène des Folies Bergère à Paris pour incarner le gangster de Chicago, Al Capone, au côté d'Anggun et de Bruno Pelletier. Al Capone est un spectacle musical de Jean-Félix Lalanne.

franceinfo : Quel effet ça fait d'enfiler le costume à rayures si emblématiques d'Al Capone ?

Roberto Alagna : Je suis ravi parce que, déjà, c'est un personnage légendaire, même si c'est un personnage un peu négatif et maléfique. Mais quelque part, c'est un personnage qui est tellement loin de moi que je suis obligé de composer un nouveau personnage et d'essayer d'aller trouver des failles, des fragilités dans ce personnage qui quelque part, quand on se plonge dedans est même assez touchant à certains moments, surtout dans la comédie musicale quand il pense à ses parents. A ce moment-là, il chante en italien. C'est quelqu'un qui est fort et faible en même temps, donc c'est un homme qui est intéressant.

Al Capone a été et reste l'un des plus célèbres gangsters américains du XXᵉ siècle. Surnommé Scarface ("Le balafré"), il a fait fortune dans le trafic d'alcool de contrebande, on était dans les années 20 à ce moment-là. Il a fortement contribué, notamment à l'émergence des mafias. Vous avez un point commun ?

Oui, l'opéra. Et puis, les origines italiennes. Lui, était napolitain, ses parents étaient de Naples. Les miens sont siciliens. En fait, je pense que c'est à cause et grâce à ça que Jean-Félix a pensé à moi. Quand il a étudié le personnage, il a vu qu'Al Capone aimait l'opéra, c'était un passionné d'opéra. Et donc c'est ça qui lui a fait penser à moi. Il s'est dit : "Tiens, mais il faut que ce soit Roberto !"

C'est curieux, souvent les mafieux aiment l'opéra. Comme quoi il doit y avoir une sensibilité cachée au fond.

Roberto Alagna

à franceinfo

Quelle place occupe justement ce sang italien qui coule dans vos veines ?

C'est capital. Ça a été les origines. C'est ce qui m'a permis de garder les pieds sur terre. C'est ce qui m'a permis de trouver ma place. C'est ce qui m'a endurci. C'est ce qui m'a donné l'envie d'évoluer, de m'adapter, de m'intégrer dans un pays. Parce que même si je suis né en France, j'étais toujours étranger. J'ai eu une carte d'identité à 18 ans. Jusque-là, j'avais une carte de séjour. Mes parents sont toujours italiens encore aujourd'hui, donc c'était très fort le lien que nous avions avec l'Italie et surtout la Sicile.

Quand vous êtes monté sur scène et que vous avez commencé à chanter pour la première fois un opéra dans la cour des grands, qu'est-ce que vous avez ressenti ?

En fait, j'étais heureux et en même temps autocritique. Et je me souviens, lors de ce premier rôle, mon agent de l'époque est venu quasiment en pleurs, heureux, à la fin du spectacle, pour me féliciter. Et moi, j'étais là avec la partition en train de dire : tiens, ça, je ne l'ai pas bien fait. Je montrais du doigt les notes et je disais : ce passage-là était raté, ça ce n'était pas bien. Et là, il m'a dit : "Roberto, vous allez devenir un très grand". Il avait vu que j'avais cette autocritique très facile et je crois que ça a été le secret.

J'ai toujours été très dans l’autocritique parce que j'étais autodidacte. J'avais toujours l'impression d'être en retard par rapport aux autres. Je travaillais donc dix fois plus, je n'arrêtais pas de travailler.

Roberto Alagna

à franceinfo

Quand on regarde Al Capone aujourd'hui, on pense évidemment à ce clin d'œil fait à votre famille.

Oui, bien sûr, puisque en plus, il y avait une sorte de rapprochement entre la mafia new-yorkaise de cette époque et mon arrière-grand-père. C'était le premier Sicilien né à New York, à Little Italy, et par la suite, ils se sont installés à City Hall et il y est décédé. Il était aussi chanteur amateur et il tenait un magasin de cuir. Et à l'époque, il devait payer des protections, mais comme il avait une belle voix, il ne payait pas la protection et en échange devait chanter dans les congrès, un peu de mafieux et tout ça !

Alors, Al Capone, vu sur scène par Jean-Félix Lalanne, c'est une histoire d'amour.

C'est Roméo et Juliette à Chicago.

Avec une grande richesse des styles qui s'entremêlent. Il y a du charleston, du pop rock, du lyrisme opératique, des chansons d'amour aussi. Il y a tout ce que vous aimez à l'intérieur de cette comédie musicale !

Oui, du fox-trot aussi. C'est vrai, il y a tout ce que j'aime. Et là, ce qui est intéressant, c'est que c'est son pire ennemi, Elliott Ness, qui a une histoire d'amour avec sa sœur. C'est terrible. Je ne voudrais pas être à sa place !

Est-ce que vous avez un côté romantique ?

Oui, bien sûr, Sinon, je ne ferais pas d'opéra. Vous savez, quand on fait de l'opéra, c'est qu'on a un côté romantique sinon on se mettrait à faire du hard rock ou autre chose. Quand on est attiré par cette musique, c'est déjà quand on est romantique.

La seule arme qu'il y a sur scène, c'est la chanson. Ce sont vos voix, à toutes et tous...

Oui et puis il y a le chapeau. Alors il y a une particularité, c'est que Capone mettait toujours des chapeaux blancs, mais à l'envers. Il y a donc une scène où, à un moment, il prend le chapeau, on voit qu'il le tourne et le met à l'envers. Comme quoi ces gens-là savaient se mettre en scène. Il y a un côté un peu théâtral. 

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