Clarika sort un neuvième album "Danse encore" : "Je n'ai jamais atteint des sommets, mais ce qui est fou, c'est de se dire que je suis encore là"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Vendredi 19 avril 2024 : l’auteure, compositrice et interprète, Clarika. Elle sort aujourd’hui un nouvel album : "Danse encore". Elle sera en concert à la Cigale à Paris le 26 novembre prochain.
Article rédigé par franceinfo, Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 16 min
La chanteuse francaise Clarika en concert au Bataclan, le 21 septembre 2021. (SOPHIE LIBERMANN / HANS LUCAS)

Le pseudo de Clarika signifie petite Claire en hongrois. C'est l'héritage d'un surnom attribué par ses parents et du sang qui coule dans ses veines, évidemment transmis par son père poète et réfugié politique hongrois et sa mère professeure de français. Elle est devenue la fille au Joker en référence à l'un de ses albums emblématiques. En 1993, il y a donc 31 ans, sortait son premier album J'attendrai pas cent ans avec le single Tu dors tout le temps. Aujourd'hui, Clarika est de retour avec un neuvième album Danse encore, soit 12 titres qui sentent bon l'envie d'en découdre avec la morosité.

franceinfo : Danse encore est un album empli d'espoir ? C'est le message ?

Clarika : Je dirais que c'est l'énergie du désespoir. Le monde est chaotique, mais on a quand même envie d'y croire. Et pour le coup, voilà, on y va.

Avec une mère professeure de français et un père poète, réfugié politique hongrois, l'écriture a  toujours fait partie de vous. Ça commence très jeune ? Dans les journaux intimes ?

Oui, comme beaucoup de petites filles, beaucoup de journaux intimes, beaucoup d'histoires commencées, jamais terminées, etc. Mais c'est vrai que dans un premier temps, l'écriture n'a pas été le moteur pour être chanteuse. C'était la scène en fait. Et l'écriture était un moyen de monter sur scène dans un premier temps, et j'y ai pris goût en écrivant mes premières chansons.

Ce qui est étonnant d'ailleurs, c'est que vous allez prendre des cours de théâtre parce qu'effectivement, votre première envie, c'était de devenir comédienne. Et c'est à ce moment-là que vous avez compris que non, c'était limité pour vous et que ça ne correspondait à ce que vous souhaitiez faire.

Oui, ça ne correspondait pas. Je ne faisais pas du théâtre pour les bonnes raisons. Et pour le coup, c'est vrai que la chanson m'a accompagnée depuis que je suis petite. On est une famille dans laquelle on chante tout le temps. Il n’y a absolument pas de professionnels, mais ça fait partie de notre culture. Et moi j'adorais.

"J'ai toujours écouté beaucoup de musique, donc cette envie de scène et la chanson ont été, à un moment donné, une évidence."

Clarika

à franceinfo

Il y a beaucoup de sensualité dans ce nouvel album. Je voudrais qu'on en parle, mais alors totalement assumé. C'est vrai que c'est étonnant quand on vous connaît parce que vous n’avez pas masqué ça, mais gardez ça pour vous pendant très longtemps. Je voudrais qu'on parle d'Isadora. Une chanson qui est sublime. Racontez-la nous.

Depuis que je suis petite, j'ai une grand-mère qui était terrorisée par ce qui lui est arrivé à Isadora Duncan, grande danseuse qui a révolutionné la danse, qui a créé la danse contemporaine. Elle est morte étranglée par son foulard un jour sur une route de la Côte d'Azur, par les roues de la voiture. Et cette histoire, c'était vraiment une histoire familiale. Dès qu'on avait une écharpe un peu longue ou un foulard, ma grand-mère nous disait : "Attention, vous allez finir comme Isadora Duncan", donc c'est vrai que cette Isadora a toujours fait partie un peu de ma vie. Et puis j'ai lu sa biographie et j'ai découvert une femme incroyable qui a eu 1000 vies, qui a donc libéré vraiment le corps de la femme par rapport à la danse, qui dansait nue alors c'est une époque incroyable et qui est morte prématurément. Féministe avant l'heure, bisexuelle, enfin une vie incroyable et c'était un formidable sujet de chanson.

Vous acceptez aussi de vous bousculer un peu, de dire des choses assez profondes. Il y a des textes encore très forts, Il y a des textes que vous ne chantez plus, mais dans ce nouvel album, par exemple, il y a Adieu salope où vous parlez des démons, du fait de dégager ces démons, ceux de l'addiction. C'était important d'aborder ça quand.

"Quand je recommence l'écriture, c'est toujours un peu le vertige."

Clarika

à franceinfo

Quand j'écris un album, je ne me pose la question sur l'ensemble de l'album, c'est-à-dire : de quoi va-t-il parler ? Est-ce qu'il y a une thématique particulière ? Il s'inscrit vraiment dans un moment donné comme je n'ai pas de chansons d'avance malheureusement. Donc à ce moment-là, en tout cas, ça s'inscrivait dans mes envies.

Ce soir je sors dit aussi énormément de choses. Il faut laisser le temps au temps ?

Cette chanson Ce soir je sors, c'est aussi l'énergie du désespoir. C'est-à-dire vraiment bon, c'est dur, le monde, c'est le chaos total. On a beaucoup d'angoisse, mais à un moment donné, on pourrait faire comme si c'était super et comme si tout ça n'existait pas et y croire encore.

Quand on parle de sensualité, il y a Rhabillez-moi aussi. Il y a un énorme jeu. Tout est très limite cinématographique, scénique.

J'adore la chanson, mais je suis aussi une grosse cinéphile. Donc c'est vrai que souvent les chansons sont, je pense, cet amour du cinéma... J'aime bien que ce soit des petits scénarios ou pas, mais ça arrive souvent. Pour cette chanson, j'avais clairement en tête : Déshabillez-moi de Juliette Gréco et c'était un clin d'œil à ses chansons que j'adore, que je chante depuis que je suis petite et que je trouve très drôles. Et puis c'était une manière de dire : on est dans un monde où on montre tout beaucoup, on dévoile tout, on est très exhibitionnistes. Parfois, ne pas montrer les choses, ne pas les dévoiler… Le mystère, c'est beau et ça peut être attirant.

Comment avez-vous vécu ces 30 ans alors ?

Je suis déjà assez heureuse d'être toujours là, d'avoir un public fidèle et qui grandit à sa guise. Je n'ai jamais atteint des sommets, mais ce qui est fou, c'est de se dire que je suis encore là et j'ai un entourage aussi professionnel qui m'accompagne et qui croit en moi. Et puis d'avoir une visibilité, de me dire à chaque fois que je vais partir en tournée, je vais retrouver le public et ça, c'est... Moi, je vois toujours le côté hyperplein du verre.

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