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Valls, l'économie et les frondeurs

Manuel Valls a répondu hier à tous ceux qui, à gauche, réclament une autre politique économique. Quels ont été les arguments du Premier ministre et sont-ils tous valables ?
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Franceinfo (Franceinfo)

Manuel Valls a clairement choisi hier une tonalité plus à gauche que lors de ses deux dernières sorties publiques, à l’université d’été du Medef d’abord, puis devant ses camarades socialistes à La Rochelle auxquels il avait fait la leçon sur les vertus de l’entreprise.

Des gages contre l'austérité

Les frondeurs refusent l’austérité qu’ils jugent dangereuse, et bien le Premier ministre leur a donné des gages : les 21 milliards d’économies prévues l’an prochain, n’empêcheront pas les dépenses publiques de progresser encore en 2015, ni le déficit de s’accroître, tout comme l’endettement de la France qui frôlera 100% de notre PIB. Impossible dès lors de parler d’austérité ou alors les mots n’ont plus de sens.

Les frondeurs exigeaient ensuite une réorientation de l’Europe et notamment de la politique monétaire. Là, Manuel Valls en a certes rajouté en attribuant à l’influence de la France les récentes décisions de la Banque centrale européenne en faveur de la croissance, mais il a eu beau jeu de constater que le climat avait changé en Europe, et que le soutien à la demande, via l’investissement ou une politique monétaire plus accommodante n’était plus tabou désormais chez nos partenaires.

Dans les pas d'Arnaud Montebourg...

Enfin, les frondeurs vitupéraient contre l’Allemagne et son dogmatisme qui l’empêcherait d’utiliser ses marges de manœuvres budgétaires pour relancer la demande en Europe, et bien le Premier ministre a affirmé sur un ton martial que Berlin devait assumer toutes ses responsabilités et qu’il irait le dire à Mme Merkel, dès la semaine prochaine. Il y avait bien évidemment une part de théâtre et de tactique, mais ce Manuel Valls là est allé jusqu’à mettre ses pas dans ceux d’Arnaud Montebourg.

 

Le Premier ministre a choisi de dramatiser son discours. Dramatiser pour mieux montrer à la gauche du parti sa faible marge de manœuvre, ce pouvait être une grosse ficelle, mais dans le cas précis, c’est aussi une réalité tangible.

Oui, Manuel Valls a raison de dire que l’Europe décroche : la croissance est insolente en Inde et en Chine, elle est robuste aux États-Unis, elle repart au Japon ou au Brésil, et pendant ce temps-là l’Europe s’enfonce, surtout d’ailleurs sous le coup des mauvaises performances de la France et de l’Italie, deuxième et troisième économies de la zone euro.

Le Premier ministre en tire argument pour justifier les 40 milliards de baisses de charges consenties aux entreprises, qui elles seules, peuvent relancer l’activité.

La gauche réformiste seule aux commandes

 

Tout ça n’a pas suffi à convaincre les frondeurs. Ils n'ont pas accordé leur confiance à Manuel Valls sans doute parce que la pédagogie et la communication ne peuvent pas tout. L’économie a toujours divisé la gauche en deux camps, une première gauche, qui croit à la toute puissance de la politique, et une deuxième gauche, plus proche du réel et de la société civile.

Le paradoxe, c’est que cette deuxième gauche réformiste tient seule les commandes pour la première fois de son histoire, mais qu’elle gouverne sans véritables troupes et dans un contexte qui n’a jamais semblé aussi hostile. 

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