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Le décryptage éco. Merkel-Trump, dialogue forcé

Angela Merkel va rencontrer aujourd’hui le président américain à Washington. Une rencontre délicate entre deux personnages que tout sépare à commencer par leur conception du commerce international.

Article rédigé par franceinfo, Lise Jolly
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Photo combinée Merkel-Trump (SAUL LOEB / AFP)

Et c’est pour convaincre Trump de ne pas ériger de murs autour de ce commerce international que Merkel se déplace. Depuis son élection, elle n’a parlé qu’une  seule fois au téléphone avec le président américain, on est loin de la lune de miel avec Obama. Celle a laquelle l'ancien président a donné le titre de défenseur du monde libre, la championne du libre-échange n’a rien en commun avec ce nouveau président américain qui défend le repli sur soi et veut ériger des frontières partout y compris dans le domaine du commerce. Son projet de budget « l’Amérique d’abord » annonce la couleur.

Une question de style

Rien de commun entre Merkel la cérébrale, prudente, réservée et attachée aux valeurs morales et le président américain sanguin, macho et bling-bling. L’histoire familiale n’arrange rien. Le grand père de Trump était allemand. Il a expulsé de Bavière pour avoir voulu échapper au service militaire. Ça laisse des traces, Trump est germanophobe. Il n’a raté aucune occasion de critiquer Merkel en qualifiant sa politique envers les réfugiés d’erreur catastrophique,  dénoncé les fameux excédents budgétaire allemands, obtenus grâce à un euro grossièrement sous-évalué face au dollar. Du coup, Trump a menacé les entreprises allemandes, notamment celles qui fabriquent des voitures au Mexique pour le marché américain, d’une taxe à 35%. BMW, Siemens et Schaeffler, le groupe de mécanique de précision, qui sont du voyage, aimeraient bien savoir à quelle sauce ils vont être mangés. Ils auront une heure d’entretien avec Trump pour défendre leurs intérêts.

L’Allemagne, partenaire de poids

La Deutschland AG, comme on dit outre-Rhin,  c’est 750 000 emplois aux Etats-Unis dans  près de 5 000 entreprises. C’est aussi 255 milliards de dollars d’investissement et pour l’Allemagne 50 milliards d’euros d’exportation. Les Etats-Unis sont un partenaire capital  comme l’a rappelé Merkel récemment mais ils ne sont plus que le troisième partenaire de l’Allemagne, derrière la Chine et la France. Les projets de budgets des deux pays sont connus. L’Allemagne a prévu d’augmenter ses dépenses militaires en 2018, ça, ça devrait plaire à Trump qui veut plus de participation des européens dans l’Otan. Il ne considère plus l’organisation atlantique comme obsolète, et ça, ça devrait rassurer Merkel.  Mais il y a encore de grosses divergences. Au G20 de Hambourg en juillet, qui est préparé aujourd'huui aussi à Baden-Baden, Merkel veut mettre l’accent sur la coopération internationale et l’aide à l’Afrique. Et ça, ça n’est pas du tout la tasse de thé de Trump, on l’a vu hier : son budget prévoit  de dépenser pour l’Amérique d’abord.

La presse allemande aux aguets

Tous deux ont déjà commencé à adoucir leur discours. Merkel ne critique plus pour l’instant le décret anti-immigration de Trump et Trump se dit prêt à lui demander conseil pour savoir comment prendre Poutine, un président russe que la chancelière, contrairement à Trump, est pourtant loin de tenir en estime. En pleine campagne électorale en Allemagne, la presse a les yeux braqués cette visite. Selon le Spiegel, Merkel veut éviter les disputes avec Washington. Car si les sujets qui fâchent sont nombreux, pour des raisons économiques, Merkel et Trump sont obligés de s’entendre. Mais l’hebdomadaire die Zeit conseillait à Merkel de brandir le panneau stop en arrivant et sur les ondes de la Deutsche Welle, un journaliste s’interrogeait : « doit-on parler à un tel président ? ».

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