Le décryptage éco. Impôts : les messages des économistes aux candidats
Lundi soir, toutes les familles d'économistes étaient rassemblées à Paris pour tenter de répondre à la question "qu’est-ce qu’un impôt juste ?" et éclairer le débat électoral à quelques mois de l'élection présidentielle.
Lundi soir, l’auditorium du Monde accueillait des groupes d'économistes de toutes les sensibilités : des économistes attérés, les plus à gauche, jusqu’au libéraux de la fondation Concorde, en passant par la Fondation Jean-Jaurès, la Fabrique écologique ou l’institut Montaigne. Tous réunis à l’initiative du Cercle des économistes, non pour rechercher à tout prix des consensus, mais pour dialoguer, réfléchir ensemble et identifier des divergences, des vraies.
Des impôts qui aient du sens
"Qu’est-ce qu’un impôt juste ?" disait l’affiche. Et bien, première surprise, il n’y a pas de vraie divergence sur cette exigence. Un impôt juste c’est un impôt qui fait sens, qui fabrique du sens collectif, de la citoyenneté, qui repose sur un choix et une vision de la société, et qui fabrique de l’équité plus que sur l’égalité.
Mais tous, chacun à leur manière, ont expliqué en préambule que cette finalité de l’impôt était comme brouillée, illisible et que c’était extrêmement dangereux. En cause : un rafistolage permanent, une opacité maximale et une complication cultivée de manière quasi-perverse, une pression fiscale globalement très forte, et une évaluation approximative des politiques suivies qui ont abimé, dégradé le civisme fiscal. Bref, le système français ne serait pas loin de la crise systémique.
Fermeté face aux entreprises
Ces économistes attendent du pouvoir politique une capacité d’action dans au moins trois domaines pour lesquels on a besoin d’agir à plusieurs. D'abord, la poursuite de la lutte contre les paradis fiscaux. Il faut pour cela une entente internationale mais l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche fait peser une incertitude.
Ensuite, une capacité à faire payer l’impôt à de nouvelles entreprises : celles du numérique. Comme leurs actifs sont immatériels, elles peuvent se jouer des frontières, et posent un problème inédit aux Etats aujourd’hui. Là aussi, il faut le faire à plusieurs et dans le cadre européen et sans casser la dynamique du numérique.
Enfin, la fiscalité écologique : il a été rappelé que la France est en la matière très mal classée au niveau européen : 24ème sur 28. Or on sait que cela fait partie des armes pour lutter contre le réchauffement climatique et qu’il faudra beaucoup de légitimité politique pour réussir à l’imposer et à la faire accepter. Ce sera un gros défi pour le prochain président.
Une baisse de quelques impôts
Ces économistes disent aussi qu’il faut baisser les impôts, mais pas tous et surtout pas n’importe comment. Le choix qu’a fait par exemple le gouvernement de sortir les premières tranches de l’impôt sur le revenu a été très critiqué, même par les plus à gauche, comme les Economistes attérés.
Ensuite il y a des divergences, ou des préférences. Les uns disent que nous sommes en Europe dans des économies ouvertes, et qu’il est temps de se rapprocher de ce que font nos voisins, tout aussi attachés que nous à l’Etat providence. Il faudrait donc diminuer notre taux de prélèvement obligatoire, et faire en sorte que les entreprises françaises soient taxées dans la moyenne et non pas bien au delà comme c’est le cas aujourd’hui.
Certains insistent plutôt sur la nécessité de renforcer l’investissement public, qui a beaucoup diminué ces dernières années, parce que la croissance est molle. Des investissements qu'il faudra bien financer par les impôts.
D’autres s’interrogent sur les baisses d’impôts promises par nombre de candidats : elles ne seront crédibles, disent-ils, que si on met en face des économies précises en matière de dépenses publiques. Et là, manifestement, le compte n’y est pas.
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