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Embarrassante fraude fiscale

Cinquante médias du monde entier révèlent ce lundi un vaste système international de fraude fiscale. Une investigation géante qui met à mal la filiale suisse de la banque britannique HSBC et met dans l’embarras des dizaines de personnalités françaises et étrangères. Le journal Le Monde est à l’origine de cette enquête mondiale.
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Tout est spectaculaire dans cette affaire. Le Monde avait déjà publié il y a juste un an, une série d’articles dévoilant les dessous d’une enquête judicaire française, les juges s’intéressaient alors aux 3.000 ressortissants français suspectés d’avoir dissimulés leur argent dans la filiale suisse d’HSBC, avec la complicité de la banque. Près de 6 milliards d’euros auraient ainsi été dissimulés. Quelques jours après la publication de ces articles, se présente au siège du journal, un homme qui remet à nos deux investigateurs, Fabrice Lhomme et Gérard Davet, une clé USB, sur laquelle se trouve la totalité des fichiers qui avaient été dérobés par un ancien salarié de la banque HSBC, et que les services fiscaux français avaient déjà classés et retraités. C’est énorme : il y a là les noms de 100.000 clients, du monde entier, de 20.000 sociétés off shore, pour un total de 180 milliards d’euros qui auraient transités par la filiale de la banque à Genève, entre novembre 2006 et mars 2007.

Comment travaillent les journalistes ?

En clair, il y a trop de données pour une seule équipe d’investigation et c’est là que Le Monde décide de partager ses informations au printemps dernier avec le Consortium international de journalistes d’investigation, une association basée aux Etats-Unis : près de 50 médias, et 154 journalistes vont ainsi travailler ensemble et dans le plus grand secret sur cette enquête hors normes, dont Le Monde et les autres médias publient aujourd’hui le premier volet.

Que révèle précisément cette enquête ?

Un système de fraude très sophistiqué d’abord, accablant pour la filiale suisse d’HSBC qui démarche le plus souvent ses clients pour leur proposer d’échapper au fisc. Et puis des milliers de cas personnels, embarrassants on s’en doute. Il y a là une liste baroque de trafiquants d’armes ou de stupéfiants, des financiers d’organisations terroristes, des hommes politiques, des vedettes du showbiz, des icônes du sport, des diamantaires, mais il y a aussi, comme dans les dossiers français, des chirurgiens qui blanchissent leurs honoraires. On voit ainsi passer les dossiers du roi du Maroc Mohamed VI, de l’acteur américain John Malcovitch, ou de plusieurs noms français, l’humoriste Gad Elmaleh, le grand coiffeur Jacques Dessange ou l’héritière de Nina Ricci : les deux premiers ont d’ailleurs régularisé leur situation auprès du fisc français, tandis que cette dernière va faire l’objet d’un procès dans les prochains jours.

Et que disent la banque HSBC et sa filiale suisse ?

La banque est prise dans la tourmente, les juges français enquêtent depuis cinq ans, leur dossier d’instruction est vertigineux, d’autres pays sont sur le dossier et ont sollicité l’aide judicaire de la France. A l’évidence,  la banque semble prête à plaider coupable et à payer une amende record pour s’éviter un grand procès. Elle affirme aussi qu’elle a désormais fait le ménage. En très peu de temps, la presse mais aussi la pression politique internationale auront beaucoup fait avancer la lutte contre la fraude fiscale.

Vincent Giret, du journal Le Monde.

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