République démocratique du Congo : le conflit avec le Rwanda
Le Conseil de sécurité des Nations unies se réunit ce mercredi 27 mars à New York, au sujet de la situation en République démocratique du Congo (RDC). C'est une crise humanitaire quasiment sans précédent, des centaines de milliers de Congolais sont sur les routes. Depuis maintenant plus de deux ans, le Rwanda est accusé par la RDC, ainsi que par de nombreux rapports des Nations unies, de soutenir un groupe armé nommé le M23 qui tire ses origines d'anciennes rébellions à majorité Tutsi. Aujourd'hui, les rebelles occupent une large partie de la province du Nord-Kivu, qui se situe à la frontière avec le Rwanda et l'Ouganda.
RDC-Rwanda : le duel sans fin entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame
Les tensions entre la République du Congo et le Rwanda se sont transformées en une joute verbale et diplomatique sans fin. Le chef de l'État congolais, Félix Tshisekedi, dénonce une "agression rwandaise" et refuse d'entamer un dialogue avec le M23, préférant s'en prendre directement à Paul Kagame, président rwandais, comme ce fut le cas lundi 25 mars. "Un jour, tout cela s'arrêtera d'une manière ou d'une autre et nous retrouverons, je crois, le bonheur de vivre ensemble en tant que voisins. Mais pour le moment, il y a un perturbateur, un empêcheur de tourner en rond. Mais il n'est pas éternel. Un jour, son jour viendra et il cessera de jouer avec la vie des gens". Des propos mesurés, en comparaison de ceux prononcés lors de la récente campagne présidentielle à l'issue de laquelle Félix Tshisekedi a été réélu. Il avait alors comparé Paul Kagame à Adolf Hitler.
Le Rwanda refuse de dire qu'il est à la manœuvre
Dans une récente interview donnée au mensuel français Jeune Afrique, Paul Kagame s'est contenté de dire qu'il n'avait aucun intérêt à déployer ses troupes dans l'est de la RDC et que le président congolais est "capable de tout, sauf de mesurer les conséquences de ce qu'il dit". Nous sommes donc bien aujourd'hui dans une joute verbale, émaillée d'incidents comme la mort de soldats congolais à la frontière rwandaise, ou encore des tirs des défenses antiaérienne rwandais sur un avion de chasse et un drone congolais. Des incidents qui n'ont pour autant pas fait exploser la cocotte-minute.
Des tractations diplomatiques sous l'égide de l'Angola sont pour le moment en cours. Seulement, pour entamer ce dialogue, Kinshasa exige comme condition le retrait des forces rwandaises de son territoire, ainsi que le cantonnement des éléments du M23. Mais la capitale rwandaise, Kigali, refusant de dire qu'elle est à la manœuvre, c'est le statu quo prévaut.
Chine : 10 milliards de profits contre moins d'un milliard de projets d'infrastructures
La RDC est aussi une terre très convoitée, notamment pour ses ressources en cobalt et en cuivre. L’un des pays les plus présents en RDC est la Chine. C'est même un partenaire historique. Les Chinois sont à l’origine de nombreux projets d’infrastructures, mais dans une relation pas forcément équilibrée. La Chine est accusée de profiter un peu trop des richesses de la RDC. Les autorités congolaises ont donc entrepris de revoir ce partenariat. La Chine va devoir réduire ses profits.
La Chine reste la bienvenue en RDC, mais pour profiter des ressources congolaises, les Chinois vont désormais devoir mettre davantage la main au portefeuille. Ce principe s’est traduit il y a quelques jours à Kinshasa par une signature très importante pour la RDC, avec la révision de ce que l’on appelle au Congo le contrat du siècle conclu en 2008 entre le président Kabila à l’époque et un consortium chinois. Un contrat sous forme de troc qui permet aux entreprises chinoises d’exploiter les importantes ressources minières du Congo, cobalt et cuivre notamment. En échange, la Chine doit construire de nouvelles infrastructures pour la population congolaise, essentiellement des routes.
Mais cette relation est vite apparue déséquilibrée. L’année dernière, l’inspection générale des finances du Congo avançait des chiffres particulièrement éloquents. Ce seraient 10 milliards de dollars de profits pour les Chinois grâce à ce contrat du siècle, alors qu’en retour, la RDC avait perçu seulement moins d’un milliard de dollars sous forme de projet d’infrastructures. C’est ce qui a poussé le président Tshisekedi à se prononcer pour la révision de cet accord, qui est donc désormais effective. Un partenariat qui se veut plus équitable. Les investissements imposés au consortium chinois passent de trois à sept milliards de dollars, ce qui devrait permettre de construire entre 5 000 et 7 000 kilomètres de routes au Congo.
La Turquie, le nouveau concurrent
Les Chinois présents depuis l’époque du maréchal Mobutu dans l’ex-Zaïre sont à l’origine de nombreux bâtiments à Kinshasa, le Parlement, le stade des martyres, de nombreuses avenues. Mais les nouveaux bâtisseurs, qui ont le vent en poupe en ce moment, ce sont les Turcs, qui mènent la vie dure aux entreprises chinoises. La Chine perd des marchés et la Turquie ne cesse de s’imposer à l’image de l’imposant nouveau centre financier de Kinshasa, construit par la société turque Milvest. Le bâtiment abrite le ministère des Finances, un centre de conférence, cinq tours administratives de 20 étages et bientôt un hôtel 5 étoiles.
Les Congolais ont été impressionnés par le travail des ouvriers turcs qui ont construit le site en un temps record. Et ce n’est pas le seul marché que la Turquie a décroché. Il y a aussi un stade pour le basket, la rénovation de l’aéroport de Kinshasa qui, à l’origine, devait être attribué aux Chinois, et la construction d’un téléphérique. Si la Chine n’est pas prête de disparaître en RDC, elle a désormais un concurrent très sérieux.
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