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Guerre en Ukraine : quelle est la réaction du Royaume-Uni, de l'Allemagne et de la Chine ?

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction Londres, Berlin et Pékin où les chefs d'État ont pris des positions bien différentes au sujet de l'invasion russe.

Article rédigé par franceinfo - Laura Kalmus, Emmanuelle Chaze, Stéphane Pambrun
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, le jeudi 24 février 2022. (JEFF J MITCHELL / POOL)

Après l'entrée des forces russes en Ukraine, Emmanuel Macron a promis, jeudi 24 février, des sanctions "sans faiblesses" contre Moscou. Quelle est la position des autres pays de l'Otan ? Nous partons en Chine, en Allemagne et au Royaume-Uni.

Le Royaume-Uni sanctionne des banques et oligarques russes

Boris Johnson a adressé un message à la nation, jeudi en début d'après-midi, dans lequel il a pris un ton grave et a utilisé des mots forts. Le Premier ministre britannique a qualifié le président russe de "dictateur" qui a attaqué un pays ami sans aucune provocation et sans justification crédible.

Plus tôt dans la matinée, une réunion de crise "Cobra meeting", comme on l’appelle au Royaume-Uni, a été organisée à Downing Street avec un objectif : répondre aux attaques militaires. Boris Johnson est décidé à agir : "Aujourd’hui, avec nos alliés, nous allons nous mettre d’accord sur un paquet massif de sanctions économiques dans le but d’entraver l’économie russe. Diplomatiquement, politiquement, économiquement, et en fin de compte militairement, cette entreprise atroce et barbare de Vladimir Poutine doit se solder par un échec."

Lundi, le chef du gouvernement avait déjà décidé de sanctions contre cinq banques russes ainsi que trois milliardaires considérés comme étant proches du Kremlin. Leurs actifs au Royaume-Uni ont été gelés et les trois oligarques ne pourront plus se rendre sur le territoire britannique. Des mesures qui d’ailleurs avait été jugées trop faibles par certains députés.

Boris Johnson demande également une réunion d'urgence des dirigeants de l'Otan. Dans un tweet, le Premier ministre parle de "catastrophe pour le continent". Certes, le Royaume-Uni ne fait plus partie de l’Union européenne mais il espère s’accorder avec ses alliés du G7 et les pays de l’Otan. D’autres sanctions sont à l'étude pour toucher de nombreux secteurs, notamment l’industrie du pétrole et du gaz.

Mercredi, les députés britanniques, s’inquiétaient aussi des moyens de communication de la Russie. Au cœur du débat, la chaîne Russia Today et son rôle de désinformation dans la crise ukrainienne. Boris Johnson a demandé un réexamen de la licence de la chaîne russe mais il ne veut pas décider lui-même de l'interdiction de diffusion.

En Allemagne, un constat d'échec diplomatique

Le chancelier Olaf Scholz s'est, lui aussi, exprimé au sujet de la guerre en Ukraine jeudi dans une réaction véhémente. Le chancelier allemand a qualifié ce 24 février de "jour terrible pour l'Ukraine", de "jours sombres pour l'Europe". Avec son attaque contre l'Ukraine, Vladimir Poutine va à l'encontre du droit international, rappelle le chef de l'État allemand, "Il apporte souffrance et destruction, met en danger d'innombrables personnes innocentes ainsi que la paix en Europe". Pour Olaf Scholz, rien ne justifie l'action de Vladimir Poutine et c'est une guerre qu'il a lui même lancée.

L'Allemagne, comme la France, ont essayé de jouer la carte diplomatique mais finalement, tout a volé en éclats. Les événements des dernières heures montrent que la stratégie allemande de privilégier la diplomatie, le dialogue, les liens économiques entre les deux pays, n'a pas payé. Les accords de Minsk ont volé en éclats. Le format Normandie (Russie, Ukraine, Allemagne et la France) - adopté pendant la guerre du Donbass - est, lui aussi, remis en cause puisqu'il n'y a plus de liens diplomatiques entre l'Ukraine et la Russie. Ne reste pour le moment pour l'Allemagne que la voie des sanctions économiques.

Parmi les sanctions annoncées, l'une est sur toutes les lèvres à Berlin : la suspension de NordStream 2, annoncée mardi par le chancelier. C'est un gazoduc reliant l'Allemagne et la Russie par la mer Baltique, un projet controversé dès le départ, un gazoduc jamais mis en service qui devait acheminer encore davantage de gaz russe sur le territoire allemand. L'Allemagne dépend fortement de cette énergie puisque 50% de ses besoins sont couverts par la Russie. On s'attend donc, sinon à des pénuries, du moins à de forte hausse des prix en matière énergétique. Et si plus de 40% des Allemands sont favorables à ces sanctions économiques, Berlin est également critiqué pour avoir tardé à accepter de suspendre Nord Stream 2 et aussi pour avoir refusé de fournir du matériel militaire défensif à l'Ukraine.

La Chine privilégie ses accords économiques avec la Russie 

La Chine reste sur sa diplomatie du ni ni, ni condamnation ni soutien formel. Pékin a simplement exhorté toutes les parties à la "retenue" après l'intervention militaire russe en Ukraine, lors d’un point presse, jeudi matin, ce qui est vraiment le minimum. Le régime chinois se refuse toutefois à parler d’invasion et continue à s’opposer à toutes sanctions.

Pékin et Moscou sont sur la même longueur d’ondes. Le président chinois s’oppose à un élargissement de l'Otan dessinant une fracture entre, d’un côté les pays Occidentaux, et de l’autre, la Chine et la Russie. Les deux pays préfèrent développer une lecture parallèle des tensions à l'oeuvre en Europe et en Asie. La Chine voit ainsi dans la défense de Taïwan par les Occidentaux la même politique d'ingérence dont la Russie accuse l'Union européenne en Ukraine. Pékin a aussi passé ces derniers jours à accuser les États-Unis de "souffler sur les braises" et d’être en quelque sorte à l’origine de cette crise sans précédent.

La Chine peut-elle venir au secours de Moscou en cas de sanctions ? On s’en souvient, Vladimir Poutine était à Pékin le 4 février pour l’ouverture des Jeux olympiques d'hiver où il a rencontré Xi Jinping et signé une quinzaine d’accords commerciaux. Le président chinois a aussi signé au début du mois un contrat de 117 milliards de dollars pour importer toujours plus de gaz et de pétrole russe. Un accord qui s’ajoute au contrat du siècle : 400 milliards de dollars, en 2014, deux mois à peine après l’annexion de la Crimée par les troupes russes.

Si la Russie ne vend plus ses hydrocarbures à l’Occident, la Chine sera toujours cliente. Cette boulimie chinoise pourrait permettre de renflouer en partie les caisses de Moscou, même si Pékin ne veut pas non plus se mettre à dos le reste du monde et risquer à son tour d’être ciblée par des sanctions. 

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