Face à la guerre en Ukraine, est-ce la fin de la neutralité comme doctrine en Suède, Finlande et Suisse ?
La guerre en Ukraine rouvre le débat sur la neutralité de certains pays. Jusqu'au mois de mai, c'était la doctrine officielle en Suède et en Finlande. Depuis, les deux pays ont demandé leur adhésion à l'Otan. La Finlande compte 1 340 kilomètres de frontière avec la Russie. Les Finlandais se sont ainsi sentis vulnérables face aux Russes.
Depuis le début de l'invasion russe, la Finlande a déjà envoyé 11 paquets d'aide militaire. Elle devrait en envoyer un douzième avec près de 400 millions d'euros d'armes et d'équipement. On ne connaît pas le détail de ces envois, le gouvernement ne communique pas.
Bien qu'officiellement non-alignées, la Finlande et la Suède s'entraînent en réalité régulièrement avec les forces de l'Otan. Ces exercices conjoints des forces terrestres, navales et aériennes, ont encore eu lieu cet hiver en Finlande et dans la Baltique. La Finlande est aussi très impliquée dans la formation d'une dizaine de milliers de soldats ukrainiens volontaires, son armée est aguerrie aux conditions hivernales, mais, surtout, aux spécificités du combat contre l'ennemi russe.
Un système d'artillerie d'une portée de 50 km livré à l'Ukraine
La Suède est le quinzième plus grand producteur d’armes au monde. Elle a entre autre une grande entreprise, Saab, qui a la particularité de couvrir presque toutes les sphères de l’industrie militaire, des avions de combat, les fameux Gripen, des missiles, des radars, des sous-marins. Aujourd’hui, la Suède fournit à l’Ukraine de l’équipement suédois. La semaine dernière, la Suède a annoncé l’envoi d’une livraison d'armes évaluée à 350 millions d’euros. Dans cette livraison, il y a l'Archer, un système d’artillerie mobile très puissant, très précis, d'une portée de 50 km.
Ces livraisons d’armes sont le marqueur de la fin de la neutralité. Mais aujourd'hui la Suède reste plus prudente que la Finlande sur la candidature à l’Otan, elle a d’ailleurs posé comme condition qu’aucune base de l’Alliance ne soit présente sur son sol.
La Suisse poussée à changer de doctrine
Depuis le début de la guerre, la Suisse a toujours refusé de livrer des armes à l'armée ukrainienne, mais a aussi refusé à des pays tiers de le faire. Berne a par exemple dit non à deux reprises à l’Allemagne qui voulait utiliser des munitions suisses pour des chars antiaériens qu’elle a envoyée à Kiev. La Suisse reste inflexible sur sa neutralité, son droit lui interdit de fournir des armes à un pays en guerre.
Des députés suisses ont pourtant ouvert une brèche récemment. Ils proposent de modifier cette loi sur les ventes d'armes. Deux options sont sur la table : faire exception à l'Ukraine ou faire exception pour tous les pays attaqués dont l'attaque a été condamnée par l'ONU.
Aujourd'hui, la position suisse agace beaucoup ses alliés. Le refus opposé au voisin allemand de réexporter les munitions suisses n’est pas bien passé du côté de Berlin. "La Suisse est un pays souverain. Nous avons le plus grand respect pour la Confédération, explique le ministre allemand des Finances, Christian Lindner, interrogé par la télévision suisse. Mais quand on prend ce genre de décisions, il faut s’attendre à ce que ses partenaires et ses amis se tournent vers d’autres fournisseurs, y compris pour l’armement."
Une mise en garde importante pour les Suisses, car l'Allemagne est le premier client du pays pour l'achat d'armement. D'autres pays pourraient suivre l'exemple allemand. La menace est prise au sérieux en Suisse. Le secrétaire général de l’Otan a lui aussi incité la Suisse à revoir sa copie. "Le cas de l’Ukraine n’a rien à voir avec la neutralité", a dit Jens Stoltenberg. "Il s'agit de respecter le droit à la légitime défense […] et de défendre la charte des Nations unies".
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