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Vaccin contre le Covid-19 : la Chine revendique déjà près d'un million de personnes vaccinées dans le pays

Les vaccins injectés sont toujours en phase d’essai et n'ont pas été homologués. Mais le gouvernement en a tout de même autorisé une utilisation d’urgence dès juillet pour des personnes jugées essentielles comme les diplomates, les gens qui voyagent pour leur travail et les directeurs d'école.

Article rédigé par Dominique André
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Une employée du groupe pharmaceutique Sinopharm manipule un échantillon inactif de vaccin contre de Covid-19 à Pékin (Chine), le 10 avril 2020. (ZHANG YUWEI / XINHUA)

Alors que la France, par la voix de la Haute autorité de santé, a présenté lundi 30 novembre, sa stratégie de vaccination nationale contre le Covid-19, en Chine une campagne de vaccination à grande échelle a déjà commencé il y a plusieurs mois. Les vaccins utilisés n'ont pas encore été homologués officiellement, ils sont toujours en phase de test. Et pourtant il ne s'agit pas d'un essai mais bien d'une campagne autorisée par le gouvernement. Près d'un million de personnes auraient déjà été vaccinées.

Vaccin obligatoire pour les salariés qui voyagent

En Chine, il n'y a pas d’annonce publique permettant de savoir où ont lieu les vaccinations. Il faut chercher, se renseigner. Un matin, vers 8 heures, nous rencontrons devant la grille d'une des usines de Sinopharm – le plus grand fabricant de vaccins en Chine et qui développe deux vaccins anti-Covid – une centaine de personnes patientant dans le froid. Ce sont des hommes entre 30 et 50 ans, pour la plupart. Ceux qui ont accepté de nous parler travaillent dans des sociétés chinoises qui ont des contrats à l’étranger, notamment sur les "nouvelles routes de la soie", le programme des routes commerciales lancé par le président Xi Jinping.

Un homme d'une trentaine d'années scanne un QR code puis fait vérifier son nom au gardien qui le laisse entrer. C'est son entreprise qui l’a envoyé se faire vacciner, une démarche obligatoire : "Je vais en Indonésie. Mon entreprise a un contrat avec une mine de nickel. Comme la pandémie à l'étranger est grave, notre entreprise a demandé aux employés de revenir en Chine pour se faire vacciner et on pourra repartir après."

Le vaccin nous protégera, nous et la société. On nous dit que c'est obligatoire pour travailler à l'étranger. Aujourd’hui c'est la première injection, ensuite j'en aurai une deuxième.

Un salarié chinois

à franceinfo

Les vaccins injectés sont toujours en phase d’essai. Il s'agit de vaccins candidats en phase 3 finale, une étape qui va déterminer leur sécurité et efficacité. Ils n’ont pas encore été homologués. Sinopharm affirme que seuls quelques patients ont présenté des symptômes légers. Aucune donnée n'a été publiée.

Sont éligibles à cette première phase de vaccination : les employés des entreprises publiques qui travaillent à l'étranger et les diplomates – ceux qui ont accompagné le ministre des Affaires étrangères Wang Yi au mois d’août en Europe ont ainsi été vaccinés – des directeurs d'école ainsi que des employés qui travaillent en Chine dans des zones à risque comme les aéroports, les ports, les douanes. Des étudiants se font aussi vacciner pour partir dans les universités en Europe ou aux États-Unis. Eux sont volontaires et doivent payer 50 euros pour les deux injections.

Aucune critique sur les risques encourus

L'utilisation d’urgence du vaccin est notamment défendue par Zheng Zhongwei, directeur au centre de prévention et de contrôle des maladies. "L'autorisation d’utilisation d’urgence pour un nouveau vaccin est une mesure absolument nécessaire. La décision d’approuver cette mesure a été prise après de multiples débats et une évaluation qui respecte la réglementation de l’Organisation mondiale de la santé", affirme-t-il.

>>> Covid-19 : la course mondiale au vaccin

La presse officielle chinoise a critiqué les articles publiés en occident sur les risques encourus en l’absence de données scientifiques publiques sur la phase 3. Parmi les employés que nous avons rencontrés sur le site de Sinopharm, un technicien, en partance pour la Serbie exprime lui aussi toute sa confiance. Il n'est pas le premier à être vacciné dans son entreprise : "Les vaccins chinois sont sûrs. J'ai déjà fait la première injection, tout va bien. Selon les données officielles, le vaccin nous protégera de un an à trois ans. L’utilisation d’urgence a commencé en juillet. Je ne sais pas quel vaccin j’ai eu."

Avant moi, beaucoup de mes collègues ont été vaccinés. Personne n'a eu d’effets secondaires. Aucun n’a attrapé le Covid à l’étranger.

Un technicien chinois vacciné

à franceinfo

Une commercialisation des vaccins chinois est-elle bientôt prévue dans la course mondiale qui s’annonce ? Un autre groupe chinois, Sinovac, développe également un vaccin, mais Sinopharm semble avoir une longueur d’avance. Le leader du secteur en Chine a annoncé la semaine dernière avoir déposé une demande de commercialisation de son vaccin auprès des autorités chinoises. Le fabricant a déclaré pouvoir produire un milliard de doses à partir de l’année prochaine, et avoir vacciné presqu'un million de personnes en Chine.

"Le vaccin développé par Sinopharm arrive à son point final, c'est le dernier kilomètre dans sa longue marche", déclare fièrement son PDG, Liu Jingzhen. La méthode n'est pas orthodoxe. "Il faut que les Chinois soient sûrs de leur coup pour vacciner comme ils le font", confie un médecin occidental à Pékin. Dans la compétition effrénée pour le vaccin, la Chine veut faire la course en tête.

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