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Le brief éco. L’Organisation mondiale du commerce sert-elle encore à quelque chose ?

Derrière la volonté de Donald Trump de surtaxer les importations d’acier et d’aluminium se trouve la remise en question des accords commerciaux entre les grandes puissances de la planète.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Donald Trump refuse de lever les lourdes sanctions qui menacent l’acier européen. (OLIVIER DOULIERY / AFP)

Les réactions internationales ont été nombreuses ces deux derniers jours encore face aux surtaxes sur les importations d’acier et d’aluminium que veut imposer Donald Trump. Si on regarde plus loin, derrière cette passe d’armes se trouve la remise en question des accords commerciaux entre les grandes puissances de la planète. La décision de Donald Trump oblige à faire un peu d’histoire : la mondialisation est possible uniquement dans un cadre économique libéral. Autrement dit, le commerce et la concurrence doivent être libres et sans entraves. C’est ce qu’ont promu les différentes révolutions industrielles, notamment aux XVIIIe et XIXe siècles, mais le concept a pris son essor à la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec les accords de Breton Woods passés en 1944 pour la reconstruction.

Du multilatéralisme aux accords régionaux

Banque mondiale, FMI, Gatt : ces trois institutions majeures dans la mondialisation datent de 1947 (le Gatt deviendra l’OMC en 1995). Leur objectif était – et est encore – de développer, d’accompagner et, normalement, réguler la mondialisation des échanges commerciaux. À l’époque, on met en place ce que l’on appelle des accords "multilatéraux". Jusqu’à plusieurs centaines de pays discutent entre eux, par secteurs, pour développer le commerce mondial. Mais, plus le temps passe, plus les discussions à 160 se complexifient. Arrive ensuite la crise de 2008 qui sonne le glas du multilatéralisme.

La mondialisation ne s’arrête pas pour autant, mais les terrains de négociations se resserrent et on passe d’accords commerciaux multilatéraux à des accords bilatéraux (entre deux pays). Exemple : l’Alena, l’accord de libre-échange entre les États-Unis et le Canada. Et ce que l’on voit aujourd’hui, c’est le développement d’accords régionaux : ce ne sont plus des pays qui discutent entre eux mais de grands blocs qui entendent défendre leurs intérêts. En clair, il y aujourd’hui trois grands blocs : Amérique (Nord et Sud), Europe emmenée par Bruxelles, et l’Asie pilotée par la Chine. Trois blocs bien décidés à en découdre.

L'OMC impuissante

Donald Trump refuse de lever les lourdes sanctions qui menacent l’acier européen alors que le Canada et le Mexique, pays voisins des États-Unis, bénéficient d’une dérogation. États-Unis, Canada, Mexique main dans la main… Voilà constitué le bloc américain, face au bloc Europe et Asie. Version régionalisme, synonyme de protectionnisme.

L’OMC ne risque pas de jouer les juges de paix. Dans tous les cas de figure, l’Organisation mondiale du commerce est virtuellement morte. Option 1 : les pays menacés par les surtaxes attaquent les États-Unis devant l’OMC et gagnent. Washington claquera alors la porte de l’Organisation, estimant que sa décision est contre les intérêts américains. Option 2 : les pays attaquent les États-Unis mais perdent. Dès lors, l’OMC s’avère un "machin" inutile. Option 3 : personne n’attaque, donc à quoi sert l’OMC ? Dans tous les cas, Donald Trump sera parvenu à ses fins.

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