Le billet sciences. Les stratagèmes d’une fleur pour être attirante : elle imite l'odeur de cadavre d'un coléoptère
On connait de nombreuses plantes qui développent des stratagèmes : forme, couleur, odeurs, pour attirer les insectes qui assurent leur pollinisation mais des chercheurs viennent de découvrir une espèce qui a mis en place un dispositif inédit : elle émet l'odeur d'un cadavre de colèoptère.
Quand on est une fleur pas très belle, pas très grande, et que pourtant il faut bien assurer sa survie en séduisant celle ou celui qui va transporter son pollen, il faut parfois faire preuve d’ingéniosité. Voici donc Aristolochia microstoma, plante endémique de la Grèce, membre d’une famille, les aristoloches, où d’habitude on a plutôt le port altier et coloré mais la pauvre microstoma elle, pousse au ras du sol et n’offre à son monde qu’une fleur terne, sorte de mini-courgette brunâtre un peu flétrie, pas loin de l’apparence d’un mégot. Qu’importe : des chercheurs viennent de montrer dans une étude parue dans la revue Frontiers in Ecology and Evolution que notre vilain petit canard a développé un dispositif d’attraction inédit. La plante émet ainsi une odeur et pas n’importe laquelle : celle spécifiquement émise par le cadavre en décomposition d’un coléoptère, une sorte de scarabée appelé scolyte. Pourquoi lui ? Parce qu’au pays des insectes pollinisateurs disponibles dans la région où pousse notre plante, il existe une mouche, dite mouche des cercueils ou mouche phoride qui adore l’odeur de ce type de cadavre.
L'Aristolochia microstoma : un exemple inédit d’adaptation
On avait déjà en rayon d’autres fleurs qui jouent sur l’odeur pour se rendre attractives, comme l’arum titan ou bien nommée fleur de cadavre qui développe sans doute l’odeur la plus nauséabonde au monde, mais comme d’autres espèces elle mise pour cela sur une évocation des fragrances putrides des vertébrés en décomposition, jamais d’invertébrés. On a donc avec Aristolochia Microstoma un exemple inédit d’adaptation. D’ailleurs, le développement au ras du sol de cette fleur serait aussi un atout, les cadavres de scarabées se retrouvant généralement à ce niveau des pâquerettes et pas en hauteur. Ainsi, doublement leurrée par l’odeur et la géographie des lieux, notre mouche des cercueils cherche son bonheur auprès de notre plante jusqu’à s’y engouffrer sans peur et s’y retrouver coincée grâce à un ingénieux dispositif de poils orientés de telle manière qu’ils empêchent la fuite. Dans ce cocon d’infortune, la mouche se couvre alors de pollen. Le piège peut se relâcher, les poils qui la retenaient se fanent et la voici libre, chargée de la précieuse semence qu’elle ira déposer bien malgré elle dans une fleur voisine, assurant à aristolochia microstoma une descendance bien méritée.
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