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L'immunité collective contre le covid-19 est-elle possible ? La situation à Manaus au Brésil sème le doute

Peut-on espérer un jour atteindre une immunité collective contre le coronavirus ? Des chercheurs internationaux en doutent après avoir analysé la situation de la ville de Manaus au Brésil. Ils viennent de publier leurs réflexions dans The Lancet.

Article rédigé par Anne-Laure Barral
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des malades du covid-19 transférés de Manaus (Brésil) à Teresina le lundi 25 janvier 2021 (JOAO ALLBERT / AGIF)

Le professeur Jean-François Delfraissy a parlé de "virus diabolique". Quand on voit son évolution et sa capacité d'adaptation, on peut se demander s'il n'a pas en effet décidé de nous faire vivre un enfer. Des chercheurs brésiliens (dont l’université de São Paulo), britanniques (université d’Oxford, London School of Hygiene and Tropical Medicine) et américains (École de santé publique de l’Université Harvard, université de San Francisco) viennent de donner une analyse de la situation à Manaus au Brésil. Dans The Lancet, ils montrent que nous sommes loin d'être sortis d'affaire.

Depuis un mois, la ville est en proie à une forte résurgence des cas de covid, avec plus de 200 hospitalisations par jour, donc plus qu’au printemps 2020. Pourtant, en octobre dernier, une étude publiée dans Science auprès d'un millier de donneurs de sang de la ville montrait que 76% d’entre eux avaient été contaminés par le coronavirus. D'habitude, avec 60-70% d'une population déjà touchée, on atteint une immunité de groupe et le virus ne circule plus puisqu'il tombe très souvent sur une personne qui n'y est plus sensible.

Chute des anticorps six mois après la première infection

En bons chercheurs, ils se sont d'abord demandés s'il y avait bien 76% des habitants qui avaient été touchés lors de la première vague et si on n'était pas plutôt autour de 50%. Ils préconisent de refaire des analyses sérologiques plus poussées pour le savoir. Mais même avec seulement la moitié de la ville infectée, il ne devrait pas y avoir autant de nouveaux cas. Pour l'expliquer, les scientifiques ont compris que les taux d'anticorps chutaient dès le mois de décembre dans les analyses de sang des donneurs. Les cas de réinfections se reproduisent plus de 6 mois après la première vague de l’épidémie dans la ville. Une preuve, pour eux, qu’il ne faut pas se croire immunisé à vie une fois qu’on a eu le covid.

La dernière hypothèse des scientifiques est que le variant dit brésilien a des mutations similaires à celui d’Afrique du Sud. Il contourne l’immunité acquise par les personnes qui ont déjà eu le covid l’an dernier, les anticorps développés après cette première infection sont donc dix fois moins puissants contre le variant. Pour l’instant, on sait peu de choses sur sa contagiosité ou s’il donne plus de symptômes.

Il faut s’attendre à des scénarii similaires dans d’autres endroits que Manaus

chercheurs brésiliens, américains et britanniques

The Lancet

Par conséquent, il ne faut guère parier sur une immunité naturelle de groupe pour mettre un terme à l’épidémie. Les chercheurs préconisent de suivre l'évolution de ce variant partout. La grande question est maintenant : est-ce que ce variant contournera aussi l'immunité des vaccins que nous avons aujourd'hui ? Faudra-t-il les reformuler pour qu'ils apprennent à notre système immunitaire à le reconnaitre et à s'en défendre ? Des résultats doivent tomber bientôt puisque le vaccin d'AstraZeneca a notamment été testé sur des patients au Brésil.

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