Une plongée inédite, et cartographiée, dans le cerveau de la mouche
La mouche peut paraître un petit animal, pourtant elle dispose d'un cerveau suffisamment complexe pour que la science s'y intéresse. Pour la première fois, ce cerveau a même été cartographié, comme l'explique Mathilde Fontez, rédactrice en chef du magazine Epsiloon.
franceinfo : Un cap vient-il d’être franchi par l'équipe de chercheurs anglais et américains qui ont réussi à dresser la première carte du cerveau d'une mouche ?
Mathilde Fontez : Oui, parce que ces chercheurs ont détaillé plus de 3000 neurones reliés par un réseau de 550 000 synapses. Cela donne en effet la première cartographie complète d’un cerveau d’animal complexe. C’est la première fois qu’on détaille ainsi la structure d’un cerveau. Jusque-là, ce type de cartes n’avait pu être réalisé que sur des animaux basiques, comme un ver par exemple, qui n’a que quelques centaines de neurones.
Même si ça reste une mouche ?
Une mouche, c'est déjà un animal complexe, qui a un comportement assez sophistiqué. Les mouches sont capables d’apprendre à naviguer dans des environnements variés, à se battre contre des rivaux, autrement dit c’est déjà un cerveau qui "réfléchit", en quelque sorte. Les chercheurs parlent pour la mouche du « plus simple des cerveaux complexes ». On y voit la circulation de l’information d’un neurone à l’autre, via le réseau de synapses.
Par exemple, les chercheurs ont pu établir que 75% des neurones sont associés à l’apprentissage et aux circuits de la récompense. Dans le cerveau des mouches, ces deux fonctions clés mobilisent énormément de ressources. Ils ont aussi identifié une sorte de hub neuronal : un circuit très dense de synapses autour de la région cérébrale consacrée à l’apprentissage. Le cerveau se concentre là-dessus.
Les chercheurs ont aussi pu détailler comment les deux hémisphères du cerveau se coordonnent. Ils ont pu distinguer les différents types de neurones : il y a 93 familles, qui ont des morphologies différentes. C’est vraiment la première fois qu’on atteint ce niveau de détails. On est bien loin de ces expériences où on a seulement une grande zone du cerveau qui s’allume.
Est-ce une étape pour réaliser la même chose sur des mammifères, peut-être sur l’humain ?
Pour l’instant non. Déjà, il a fallu des moyens énormes pour ces 3000 neurones : le cerveau des mouches a été scanné en milliers de tranches avec un microscope électronique à haute résolution. L’humain c’est 90 milliards de neurones (rien que la souris, 70 millions). Mais, de la mouche, on devrait déjà tirer beaucoup d’enseignements pour comprendre le cerveau des mammifères. Il y a des éléments similaires. Les chercheurs vont pouvoir faire de vraies études et regarder à quoi les différents comportements correspondent dans le cerveau.
Pour aller plus loin, l'étude évoquée est à lire ici (document en anglais) :
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