Notre mode de scrutin est-il juste ?
Un mode de scrutin n’est rien d’autre qu’une fonction mathématique. Des scientifiques se sont penchés sur la question.
Notre mode de scrutin est-il le plus représentatif ? La question est étudiée par des économistes spécialistes du choix social et des mathématiciens. Les précisions de Mathilde Fontez, rédactrice en chef d’Epsiloon.
franceinfo : Quels sont les défauts de notre mode de scrutin ?
Mathilde Fontez : Les mathématiciens ont pointé que certaines configurations de vote conduisent à des situations anormales - anormales au regard des qualités mathématiques qui sont exigées par les théories du vote.
Par exemple, le premier tour d’une élection comme notre présidentielle peut éliminer un candidat qui aurait probablement gagné contre tous les candidats au second tour. C’est sans doute le cas de François Bayrou en 2007 ou d’Edouard Balladur en 1995.
Autre exemple : notre système n’est pas “monotone” selon les mathématiciens : un candidat vainqueur dans une certaine configuration de vote peut ne pas être élu dans une autre configuration où il a pourtant recueilli plus de voix au premier tour. L’exemple de ça, c’est la présidentielle de 2002 : si Jacques Chirac avait gagné plus de voix au premier tour, Lionel Jospin serait passé au second… et Jacques Chirac n’aurait peut-être pas été élu.
Le plus gros problème pointé par les chercheurs, c’est la tendance de notre scrutin à inciter au vote stratégique plutôt qu’au vote sincère, au vote utile.
Quelles sont les alternatives ?
Les plus étudiées par les chercheurs aujourd’hui, ce sont les alternatives qui maximisent l’expression des votants, justement pour inciter au vote sincère. Ce qu’ils reprochent à notre mode de scrutin, c’est que la décision collective ne repose que sur très peu d’informations sur les préférences individuelles : on fait un choix à chaque tour, et c’est tout. Les expériences montrent que les électeurs ne veulent pas être cantonnés au choix d’une seule personne. Et que tout cela favorise l’abstention.
La solution, ce serait de classer les candidats par ordre de préférence ?
C’est l’un des modes de scrutins étudiés. C’est comme cela qu’on vote en Irlande ou en Australie. Le problème, c'est que cela transforme le dépouillement en un véritable cauchemar. Il y a aussi le vote par approbation : on entoure autant de noms qu’on veut dans une liste – ça revient à déposer plusieurs bulletins dans l’urne. Mais cela ne traduit pas l’intensité de préférence des électeurs. Et il y a le vote par note, ou même par jugement : on coche des cases sur une échelle : "candidat excellent", "candidat passable", comme à l’école.
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