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COP27 : qui est Stéphane Crouzat, qui pilote les négociations pour la France ?

L’intrus de l’actu donne chaque soir un coup de projecteur sur une personnalité qui aurait pu passer sous les radars de l’actualité.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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L'ambassadeur de la France à la COP27, Stéphane Crouzat, à Charm el-Cheickh, le 7 novembre 2022. (LUDOVIC MARIN / POOL)

Totalement inconnu du grand public, Stéphane Crouzat joue pourtant un rôle central dans la COP27 qui a lieu en Egypte à Charm el-Cheikh. Il est le chef de la délégation française, côté technique. En clair, il pilote les discussions techniques avec les 196 autres délégations. Il les a préparées depuis des mois. Son titre exact est ambassadeur chargé des négociations sur les relations climatiques. Stéphane Crouzat dirige une équipe de 40 personnes de plusieurs ministères : Économie, Agriculture, Transition écologique, Affaires étrangères.

Son quotidien ce sont les chiffres, les acronymes techniques, et les mauvaises nouvelles. Devant la commission du développement durable du Sénat qui lui avait demandé un état des lieux en vue de la COP, il y a trois semaines. Il ne cherchait pas à bercer quiconque d'illusion : "Depuis l'accord de Paris, nous n'avons pas réduit nos émissions et nous sommes toujours dans une phase ascendante. On doit s'attendre en 2022 à ce que nous augmentions encore, collectivement l'ensemble des pays du monde, nos émissions. Ce qui est un peu inquiétant parce que pour pouvoir rester au plus près des 1,5° C, il faudrait que nous réduisons nos émissions de 45% de nos gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 2019. Nous en sommes loin et il y a beaucoup d'efforts à fournir." Il précisait aussi que les discussions au niveau du G20 en Indonésie s'étaient mal passées. Rappelant, en bon diplomate, que l'Europe s'était fixé des objectifs très ambitieux, mais quand même, le tableau n’est pas réjouissant.

La diplomatie, c'est son ADN

Selon les époques, le titulaire du poste est un diplomate ou un connaisseur des questions climatiques. Laurence Tubiana au moment de la COP de Paris, avant elle Brice Lalonde ou Serge Lepeltier l'ancien ministre de l'Environnement, venaient d'avantage de l'écologie et s'étaient mués en diplomates. Stéphane Crouzat lui est d’abord diplomate. Formé par Sciences Po, l'ENA, agrégé d'anglais. Juste avant de s'occuper de climat il y a un an, il était ambassadeur à Dublin il était aussi passé par Varsovie, et New York. La diplomatie, c'est son ADN, dans un genre assez discret disent ceux qui le côtoient, brillant, mais vraiment pas flamboyant. Il ne fait pas de vague, plutôt du genre à l'écoute, "facile d'accès, et à l'écoute" notamment des ONG que j'ai pu interroger et qui lui sont assez reconnaissantes de ça.

La partie climat, il l'apprend au ministère de l'Environnement. Le poste de conseiller diplomatique auprès de Ségolène Royal était libre en 2014. À un an et demi de la COP de Paris, il fonce ! Et à l’issue, il passera encore toute l'année à sillonner le monde pour que les différents pays ratifient le texte de l’accord de Paris. Visiblement ça l'a passionné. "Quand on commence sur ce sujet, on ne peut plus s'arrêter", explique-t-il depuis Charm el-Cheikh. À l’origine, il n'a pourtant rien du militant écologiste. Rien dans l'environnement familial de départ : père du Sud-Ouest, mère polonaise et enfance urbaine. Mais dit-il quand même : "J'ai toujours été dans la sobriété énergétique." Il va au bureau en vélo. Ses trois enfants, âgé de 18 à 28 ans, poussent beaucoup vers la transition, dont une fille végétarienne. Ce qui fait que la famille mange moins de viande.

"On est mal partis"

De façon assez honnête il m'a avoué qu'il avait calculé son bilan carbone sur internet. La moyenne française tourne autour huit tonnes d’équivalent CO2 par an. Lui, à titre personnel serait à quatre tonnes. Sauf que sa femme étant franco-américaine, les allers-retours pour voir la famille le font monter à 18 tonnes par an. Forcément la diplomatie climatique amène aussi son lot de vols. Evidemment, pour préparer la COP27, les visio-conférences ne suffisent plus. Dans les derniers jours, il était par exemple au Sénégal et en Afrique du Sud avec la secrétaire d'État Chrysoula Zacharopoulou pour faire aboutir ce qu'on appelle les "partenariats pour une transition énergétique juste" - c'est le "milliard" finalement annoncé lundi par Emmanuel Macron pour l’Afrique du Sud.

Stéphane Crouzat ne se prononce pas encore sur l'issue de cette COP27 qui vient de démarrer. Mais globalement, dit-il : "On est mal partis." Il veut toutefois croire au 1,5° C hausse maximal d'ici la fin du siècle. À 58 ans, il considère que le mouvement entamé par Greta Thunberg a vraiment changé la donne. Il affirme même qu'il est à Charm el-Cheikh avec à l'esprit les "lanceurs de soupe" dont il dit avoir entendu l'inquiétude

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