Santé des présidents : faut-il tout dire ?
Attention
à la boîte de Pandore. Le sujet fait à chaque fois débat, de manière plutôt
vive au sein-même des rédactions : où s'arrête la vie privée, y compris
celle de ceux qui nous gouvernent, et où commence réellement l'information ? En
l'occurrence, de quoi est-il question ? Le futur candidat à la primaire
socialiste aurait subi en février 2011 une intervention à la prostate, que
l'Elysée contacté hier par France Info a qualifié de "bénigne".
Nous sommes au moment où se déroule cet épisode médical, à un an et trois mois
l'élection de François Hollande : il n'est ni président en exercice, pas
même candidat officiel du Parti Socialiste, qui hésite encore alors entre DSK
et Martine Aubry. De plus, cette opération, qu'il n'a pas jugé nécessaire
d'évoquer par la suite, ne l'a manifestement pas empêché ni de faire campagne,
ni de l'emporter, et encore moins d'exercer le pouvoir dans un contexte qui
plus est particulièrement difficile, et de faire face. Où se
situerait donc le problème : tout simplement dans la publication du
bulletin de santé du chef de l'Etat,
jugé "normal" à deux reprises par ses médecins. Il n'y a donc pas
de sujet. Si ce n'est que le citoyen devenu président a omis de signaler cet
épisode antérieur à son élection. Cet oubli nous ramène immanquablement au
débat qui n'a jamais été éteint sous la Vème République. Jusqu'où doit aller le jeu de la vérité ?
Vous
faites allusion aux présidents Pompidou et Mitterrand ?
Et pas
seulement. La mort le 2 avril 1974 du président Pompidou de la
maladie de Waldenstrom, une sorte de cancer du sang, après cinq ans de pouvoir
seulement, a posé de manière tragique ce problème de la transparence vis-à-vis de
la santé des présidents. François Mitterrand était déjà atteint d'un cancer
quand il a été élu en 1981, ce qui ne l'a pas empêché de se faire réélire en
- Mais il n'était plus en mesure d'exercer son mandat en 94. La question a
été de nouveau posée après l'AVC de Jacques Chirac en septembre 2005, qui lui a
valu dix jours d'hospitalisation. L'ancien président qui avait promis dès 95 de
donner des informations sur son état de santé, a toujours refusé la publication
de communiqués au nom du respect de la vie privée. Nicolas Sarkozy a lui-même
masqué une petite opération à la gorge en octobre 2007, qui ne l'a pas empêché
de gouverner et de pratiquer du sport. A chaque épisode, quel que soit le
niveau du problème de santé, grave ou anodin, c'est le secret qui entretient désormais le
fantasme collectif.
Que
prévoit la Constitution sur le sujet ?
Pas grand-chose.
Si ce n'est une vague procédure d'empêchement, qui rendrait impossible
l'exercice du pouvoir, une fois qu'il a été constaté par le Conseil
Constitutionnel. Cela n'a jamais été utilisé, même dans les cas extrêmes, ce
qui n'est pas notre sujet ce matin. Le problème n'est pas là. C'est une
question de curseur. La seule
question qui vaille est celui de la sacro-sainte transparence, qui peut vite
devenir un cancer de la démocratie, dans un monde où les informations se bousculent. Parce qu'aujourd'hui, tout se vaut, tout se
mélange dans les esprits nourris par la suspicion.
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