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Roms: Cécile Duflot est-elle expulsable du gouvernement?

La charge de Cécile Duflot contre Manuel Valls sur les Roms place François Hollande face à un dilemme: comment arbitrer entre ces deux ministres qui ne peuvent plus cohabiter, mais dont il a éminemment besoin ?
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Franceinfo (Franceinfo)

Cécile Duflot vient de lancer un défi au président :
vas-y chiche, vire-moi, comme Delphine Batho. La ministre verte du logement, en
tous les cas, a bel et bien ouvert une nouvelle crise gouvernementale et plombé
le retour triomphal du chef de l'Etat à Florange. Malgré quelques sifflets vite
oubliés, François Hollande s'est offert un retour gagnant chez les Arcelor
Mittal hier. Mieux encore : le président a pris un abonnement pour y
revenir tous les ans, adoubé par le leader CFDT Edouard Martin. C'était le
bonheur est dans l'usine
, une séquence de rêve, pour faire oublier une
coulée de sondages négatifs. La fête a bel et bien été gâchée.

Cécile Duflot met
François Hollande dans la difficulté.

En appelant publiquement à son arbitrage – " c'est la
responsabilité du président de la République ", a-t-elle dit dans le
micro- la ministre transgresse une règle : aucun membre du gouvernement ne
peut dicter sa conduite au chef de l'Etat. Il fallait d'ailleurs voir la tête Philippe
Martin, le ministre socialiste de l'écologie, assis à côté de la ministre du
logement, en train de se bouffer la main Pour le reste, Cécile Duflot n'a fait
que manifester son différend sur le traitement du problème des Roms, elle qui
déclare que Manuel Valls rompt le pacte républicain. Elle s'en était émue, avec
d'autres collègues, mercredi, en fin de conseil de ministres, auprès du chef de
l'Etat, bien conscient de la ligne de fracture qui divise le gouvernement sur
le sujet. Mais qui a laissé les choses en l'état, lui qui rechigne à trancher
dans le vif.

Jean-Marc Ayrault, présent hier chez les Verts, n'a pas
arbitré la crise.

Non, le Premier ministre est arrivé après la sortie de
Cécile Duflot, l'a embrassée comme du bon pain et a renvoyé à la circulaire sur
les Roms signée l'an passé. Sur le fond, il est sur la même ligne que sa
ministre, et n'apprécie guère la montée en puissance du ministre de
l'intérieur. Par ailleurs, Jean-Marc Ayrault, empêtré à Nantes avec le projet
d'aéroport de Notre Dame des Landes, veut ménager la susceptibilité des
écologistes. Vous y ajoutez ce détail ironique : cette
histoire survient au moment où le syndicaliste Edouard Martin, si aimable
hier, est approché pour figurer en place éligible sur les listes d'EELV dans le
Grand Est.

L'Elysée n'a pas
réagi hier soir. C'est une nouvelle crise.

Oui. C'est un " no comment ", le recadrage va se
dérouler dans la coulisse. Un proche du président a parlé du comportement
irresponsable, immature de Cécile Duflot : " elle se sert du problème
des Roms et du président pour ressouder son parti. Si les ministres Verts ne
sont pas à l'aise, ils peuvent partir ", a même pesté un soutien de
François Hollande. Quant à Manuel Valls, sa garde rapprochée a fait savoir que
le président était sur une ligne de fermeté au sujet des Roms, un dossier qui
exaspère les élus locaux de tous bords, et présente un risque majeur avant les
municipales. Il faut rappeler que Delphine Batho a été remerciée pour moins que
ça : l'ex-ministre de l'écologie avait certes touché au grisbi, en critiquant
le budget de l'Etat. Mais elle n'avait pas osé interpeller le président. Cécile
Duflot met François Hollande face à un choix inédit : soit il la vire, et
il ouvre un front majeur avant les élections. Soit il ne fait rien, et son
autorité en pâtira. Un dilemme cornélien, un de plus pour ce gouvernement
abonné aux couacs.

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