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Non, Hollande ne peut pas copier sur la "Koalition" de Merkel

Ils ont dîné ensemble à l'Elysée et ils se revoient aujourd'hui à Bruxelles : François Hollande peut-il former une grande coalition comme vient de le faire Angela Merkel chez elle en Allemagne ?
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Franceinfo (Franceinfo)

C'est tout simplement NON. Nein  !
Ce couple, en apparence heureux, faisait plaisir à voir hier soir. La
chancelière à peine réélue a réservé à son cher François sa première visite à
l'étranger. Nous avions envie de nous dire en voyant ces images : elle est
en forme, Angela, ça a l'air sympa, leur koalition ,
même avec un "k " : et si nous faisions pareil ?  Ceux qui croient que Mme Merkel, obligée de
cohabiter avec sa gauche, est rentrée dans le rang, ceux-là se trompent.
L'ouverture au SPD ne va rien changer dans la domination économique de
l'Allemagne.

Et nous ne sommes hélas pas en mesure de répliquer chez nous, en
France, ce modèle d'œcuménisme politique. "Les lignes et les histoires
politiques ne sont pas du tout les mêmes. L'Allemagne, à l'inverse de nous, a
déjà accompli le travail difficile avec Gerhard Schröder"
, constate l'UMP
Bruno Le Maire.

La nouvelle coalition mise en place par Frau Merkel résulte à
la fois d'un scrutin serré et d'un état d'esprit. Privée des libéraux éjectés
du Bundestag aux dernières législatives, la Chancelière démocrate-chrétienne a
raté la majorité absolue de cinq petits sièges ? Kein problem  :
Mutti a ouvert grand les portes aux sociaux-démocrates, offrant le poste de vice-chancelier et de super ministre des finances à son
rival Sigmar Gabriel. Imaginez François Hollande nommant, avec joie, François
Fillon patron de Bercy et n°2 du gouvernement. Impensable ! Les Allemands
ont quelque chose de plus que nous : certains sujets qui nous divisent ne
posent aucun problème de l'autre côté de la ligne Maginot. Il y a par exemple
un large consensus sur la compétitivité. Chez nous, c'est la guerre.

Cette coalition outre-Rhin est une bonne nouvelle pour
nous ?

Elle n'est pas mauvaise.
Certes, le patronat allemand considère cette Große Koalition comme une Große
Katastrophe. Ils ne reconnaissent plus leur Angela social démocratisée à l'extrême, voulant créer un smic teuton,
augmenter les petites retraites ou investir dans les infrastructures. Digne de feu la Deutsche Demokratische Republik ! Les
conservateurs ont peut-être la sensation de perdre leur mutter , mais il n'en est rien.

 Elle n'a pas vraiment viré à gauche ?

Pas le moins du monde !
Angela Merkel n'a fait que précéder un ralentissement économique, même très
relatif, et une contestation grandissante en Europe contre cette Allemagne à la
santé économique insolente, accusée de ne faire aucun effort, analyse le
socialiste Jean-Christophe Cambadélis. Mais ses réformes à la sauce SPD vont en
réalité fabriquer de la relance - ce qui est plutôt positif pour l'Union- et
placer la République fédérale un cran plus haut. Ça va devenir toujours plus
compliqué de s'aligner.

François Hollande va-t-il en ressortir affaibli ?

Non, le président peut se
targuer d'être à l'origine de cet infléchissement qu'il réclame depuis son
élection. Les Allemands, en fait, se débrouillent seuls. Et nous ne pouvons
même pas copier leur modèle de coalition: nous n'avons ni le système fédéral,
ni le mode de scrutin à la proportionnelle pour l'envisager. Les rares
expériences d'ouverture, tentées par Michel Rocard et Nicolas Sarkozy, ont été des
artifices ou des impasses. Et puis aucun leader de droite sensé n'irait se
perdre dans un gouvernement aussi impopulaire. Rien ne va changer dans l'équilibre
du couple franco-allemand. Nous allons attendre
encore et toujours le retour de la croissance. Qui passera forcément par
Berlin.

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