Les combats de Vincent Peillon
Depuis plusieurs semaines,
c'est Pisa à gogo au menu : Vincent Peillon, depuis fin octobre, n'a pas
cessé de nous mettre en garde sur les résultats assez pessimistes qu'allait
produire cette enquête internationale sur le niveau scolaire, qui a fait
reculer la France un peu plus près des radiateurs, avec les mauvais élèves au fond
de la classe: pas bons en maths, et surtout des inégalités qui se creusent à
l'école, nous en avons largement parlé. La grève dans le primaire aujourd'hui
tombe plutôt mal. Vincent Peillon voulait s'appuyer sur Pisa afin de provoquer
un électrochoc et riposter à la fronde des
maires contre les rythmes scolaires, sur le mode : ça va mal, ma réforme
qui met l'accent sur le primaire est la bonne, il faut changer dès les petites
classes, sinon, ce sera le décrochage massif.
Et ça a marché ? La fr onde est retombée ?
Du côté des maires, 83% d'entre
eux qui appliquent les nouveaux rythmes scolaires seraient satisfaits, veut
croire l'entourage du ministre, qui espère que le soufflet va retomber à
l'approche des municipales. Mais du côté des profs, le SNUipp, principal
syndicat du primaire, en appelant à cesser le travail, relance le débat, en
s'opposant aux rythmes scolaires et en réclamant plus de moyens. Vincent
Peillon parie sur un essoufflement en annonçant un gréviste sur cinq
enseignants seulement, y compris à Paris, alors que le syndicat revendique le
double. Cette journée aura valeur de test pour sa réforme.
A chacun ses bonnets
rouges ?
C'est le combat personnel, le
graal du ministre de l'éducation. Le gouvernement a déjà fort à faire sur
plusieurs fronts. François Hollande, qui s'est invité en personne hier
soir à une réunion des élus bretons chez Jean-Yves le Drian au ministère de la
défense, a souhaité que les manifs de bonnets rouges cessent avant Noël,
notamment grâce au plan de 2 milliards qui a été mis sur la table. Vincent
Peillon espère lui aussi apaiser le débat pour passer au temps 2 de sa propre réforme,
consacré à la refonte du métier d'enseignant. Cela commence avec un mouvement
d'humeur des profs des classes prépa. Et une droite qui a décidé de faire de
l'éduc un enjeu en vue des prochaines élections. A l'image de Laurent Wauquiez,
qui a conseillé au ministre "de s'occuper de
l'illettrisme et du calcul" , plutôt que de "la
semaine de 4 jours et demi ". L'ancien ministre de l'enseignement
supérieur et de la recherche de Nicolas Sarkozy fera une heure de colle,
l'enquête Pisa pointe la période 2009-2012, durant le
précédent quinquennat. Le PS a aussitôt riposté en expliquant qu'avec Pisa, la
France venait de "recevoir la facture éducative de dix années de droite
au pouvoir".
C'est un débat digne ?
Non, c'est du grand n'importe quoi.
Le centriste Jean-Louis Borloo est dans le vrai en appelant à un sursaut
républicain au sujet de l'école. Vincent Peillon rêve d'une mobilisation nationale,
gauche et droite confondues : faut pas rêver avant deux grands scrutins
électoraux. Mais l'urgence est là. L'écart de niveau s'est accru entre les
élèves. L'origine sociale pèse de plus en plus sur les résultats. L'école, au
fond, est à l'image d'une France qui a vu s'accroitre la fracture sociale
ces trente dernières années. Plus que jamais, l'éducation ne doit pas servir d'enjeu politique.
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