Ce tandem horripile un bon nombrede barons de l'UMP... ou plutôt : il les inquiète. Alain Juppé apporterademain son soutien à François Bayrou, lors d'un meeting commun dans la ville dePau, là où se présente le président du Modem. Ce qui met en transeJean-François Copé : le président de l'UMP ne voulait pas d'unecandidature Bayrou et a dû avaler son chapeau. Ou encore Henri Guaino :l'ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy accuse le leader centriste d'êtreresponsable de la défaite de la droite en 2012, en appelant à voter pourFrançois Hollande, après avoir fait les yeux doux à Ségolène Royal cinq ansauparavant. Ce qui signifie que Bayroupèse toujours aux yeux de l'UMP. * "Trop c'est trop, il ne s'excusepas, il ne regrette pas, et en plus, Alain Juppé va le soutenir* ",s'irrite Guaino, même si depuis la présidentielle, François Bayrou a faitmachine arrière, après avoir tendu la main à un PS qui n'a pas hésité le battreà la législative de Pau. Sans compter ses discussions secrètes avec FrançoisHollande qui n'ont mené à rien. Le virage social-démocrate du chef de l'Etatarrive trop tard. Le patron du Modem est déjà ailleurs.Sur quoi repose son alliance avec Alain Juppé ? Tout d'abord sur l'amitiéaquitaine, elle lie les deux hommes depuis toujours. Et sur un respect mutuelbasé sur un ensemble de valeurs républicaines. Même si Alain Juppé, encofondant l'UMP en 2002, est celui qui a mis en place à l'époque une machinedestinée à tuer l'UDF. La famillecentriste n'a depuis jamais cessé de se diviser, en Modem, Nouveau Centre, UDI,au point de devenir illisible, jusqu'au récent pacs Borloo-Bayrou, qui n'a pasencore fait ses preuves.** Aujourd'hui, c'est au tour de l'UMP de connaîtreune crise d'identité profonde, aggravée par le divorce Copé-Fillon et l'affaireBuisson. Comme Nicolas Sarkozy maintient le mystère autour de son éventuelretour, Alain Juppé, très haut dans les sondages, prend son autonomie et apparaîtcomme un possible recours: le maire de Bordeaux, qui vise une réélection dès lepremier tour le 23 mars, incarne désormais l'expérience et la sagesse, tournantle dos à la vision trop droitière d'une UMP qui court en vain après le FrontNational.D'où l'idée d'un ticket Juppé-Bayrou ?Vous avez deux vétérans, républicains,démocrates, de droite modérée, qui ont tout connu : Alain Juppé, qui préparediscrètement l'avenir même s'il déteste qu'on lui parle de 2017. Et François Bayrou qui travailleà sa propre résurrection. Elle passe par une très difficile élection à Pau,fief de gauche. Le dernier sondage Ipsos le donne gagnant quel que soit lescénario de deuxième tour mais ce sera dur.L'idée pour les deux hommesserait de bâtir un projet politique commun, pour tenter de répondre à ladéception de bon nombre d'électeurs, y compris de gauche. Un responsablecentriste évoque déjà un ticket Juppé-Elysée et Bayrou-Matignon dans trois ans.C'est encore loin.Ce pacte d'Aquitaine, et il yaura sans doute d'autres associations de ce type, et de tous les bords, démontre que les coutures des partis politiques traditionnels sont en train decraquer, parce que ces familles fracturées sont en déphasage avec une opinionmécontente, qui réclame de l'écoute et de la compétence. Un début de programme.