Le FN sur le point de tourner la page Jean-Marie
C'est une voix et des mots que l'actuelle direction du Front national préfère ne plus entendre à la tribune lors des ses défilés du 1er mai. C'était Jean-Marie Le Pen en 1998. Il s'en prenait à Jacques Chirac : "Non content d'avoir fait tranporter la réserve d'or de la banque de France à Francfort, en "Deutschland", ce que n'avait pas espérer Hitler, ni consenti le maréchal Pétain après la défaite de 1940, c'est Chirac qui l'a fait, comme un super-collabo ", lançait Jean-Marie Le Pen devant des militants surchauffés.
Visions de la seconde guerre mondiale
Ces petit jeu "provoc'" de références à la seconde guerre mondiale, qui plonge en fait l'extrême-droite dans ses propres racines, ce rappel détourné à un héritage, Marine Le Pen avait déjà dit qu'elle ne voulait plus l'assumer. Elle s'en est expliqué en 2008, interrogée sur l'affaire du détail : "C'est un sentiment de Jean-Marie Le Pen sur une période de l'Histoire. Ce n'est pas une ligne politique, ça ne participe pas du programme du Front national. Donc la question ne se pose pas. J'ai dit que je ne partageais pas cette vision de la seconde guerre mondiale. On peut avoir des divergeances sans que ça touche à des éléments fondamentaux ".
Il y a quelques semaines, le numéro deux du parti, Florian Philippot parlait de "faire tomber les branches mortes ", secouer le FN de ces vieux relents trop sulfureux qui rebutent les électeurs. C'est aussi le but de l'opération Rassemblement bleu marine, cette structure informelle dont on trouve le nom sur les affiches électorales du Front national : petit exercice de prestidigitation politique pour noyer le réflexe de rejet des électeurs. Si Marine Le Pen ne veut pas être gênée par l'histoire de l'extrême-droite, c'est pour mieux se recentrer sur certains ressorts fondamentaux, comme la figure du chef. Illustration hier place de l'Opéra : "Il faut maintenant un vrai chef, un chef qui agisse enfin. La France ne peut plus attendre. En ces temps obscurs, où la molesse le dispute au laxisme d'Etat, nous avons besoin d'autorité ".
Jean-Marie Le Pen toujours présent
Le président d'honneur du Front national s'est fait discret cette fois au 1er mai, ne prenant pas la parole et quittant la scène assez rapidement. Toutefois, il garde son espace : il a son blog vidéo sur le site internet et il effectue toujours des tournées en France. Mais pour le chercheur Sylvain Crépon, auteur d' "Enquête au coeur du nouveau FN", il est déjà ailleurs : "Il a un pouvoir de nuisance très important et ça, ça inquiète beaucoup l'entourage [de Marine Le Pen, ndlr]. Mais une page est en train de se tourner. Soit pour des raisons de stratégie, soit pour des raisons de renouvellement générationnel soit parce que Jean-Marie Le Pen fatigue, il commence à être sensiblement marginalisé dans l'appareil. Il y a aussi le fait que Jean-Marie Le Pen vieillit, que le FN est en train de se renouveler. Et toute cette nouvelle génération, Jean-Marie le Pen, lui, n'a aucune prise ".
Le responsable du FN jeunesse, Sylvain Rochedy, assume ce renouvellement, sans couper les ponts : "C'est aussi pour Marine qu'ils ont rejoint de le FN, c'est sûr c'est une page peut-être plus jeune, plus moderne, parce qu'elle correspond plus à notre âge. Jean-Marie Le Pen c'était des combats qui datent maintenant d'il y a 40 ans. Donc c'est vrai qu'on le voit comme un père, un père spirituel, mais dans le combat actuel, on est avec Marine, derrière elle parce qu'on sait que c'est elle qui porte un projet, qui peut prendre le pouvoir et qui peut chanter radicalement les choses ".
Député apparenté FN, revendiqué Rassemblement bleu marine, Gilbert Collard est aussi dans cette logique là : se débarrasser des vieux oripaux et offrir un ravalement au programme pour en retenir l'essentiel et accéder au pouvoir.
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