Fraude fiscale, conflit d'intérêt, mensonge, la triple fautede Jérôme Cahuzac jette le discrédit sur l'ensemble des élus, et disqualifiesans doute durablement la parole politique. Sonnés, les responsables de lamajorité comme de l'opposition tentent d'échapper à l'amalgame avec, parfois,de notables accents de sincérité.Gérard Filoche, inspecteur du travail en retraite, membre dubureau national du parti socialiste, en aurait presque les larmes aux yeux : "C'est la misère dans le pays, il y a cinq millions de chômeurs, dixmillions de personnes pauvres dont on ne parle pas, et on a un chef du Budgetqui fraude lui-même, qui ment, les yeux dans les yeux. Vous croyez comme membredu bureau socialiste je peux supporter cela ? Vous croyez que lespolitiques, les militants, les syndicats peuvent supporter cela ? On nepeut pas être sali par des histoires comme cela. Il y en a assez. "La sincérité politique mise en douteOr c'est précisément cette sincérité du politique qui estaujourd'hui, plus que jamais, mise en doute. Une question, centrale, domine :l'Elysée et Matignon étaient-ils au courant ? François Hollande et Jean-MarcAyrault répondent évidemment que non. Le président prend acte avec une grandesévérité d'une impardonnable faute morale et son Premier ministre cible lafaute d'un seul homme. Un message relayé par les troupes de la majorité."Par définition la notion de compte en Suisse aquelque chose à voir avec le plus grand des secrets possibles et que leprésident et le Premier ministre l'aient ignoré ne me choque pas. Ce que jeconstate c'est qu'ils ont mis à peine trois heures à prendre acte de sadémission, le jour où une information judiciaire a été ouverte contre M.Cahuzac. Cette rapidité les honore ", estime Thierry Mandon, porte-paroledu groupe PS à l'Assemblée.La droite pilonne, sur le mode : ils ne pouvaient pas ne passavoirPour échapper au discrédit, la droite rejette la faute surune gauche prétendument morale. Jean-François Copé, le patron de l'UMP, dénonced'ores et déjà un mensonge d'Etat : "Le président de la Républiquedoit maintenant s'expliquer. Nous dire si ou non il était informé de cettesituation. Le doute est dans tous les esprits. Il est bien difficile d'imaginerque François Hollande n'est jamais été informé de rien, alors que même que JérômeCahuzac était son ministre du Budget et qu'ils ont eu de nombreusesexplications. "François Hollande savait-il, Ayrault a-t-il eu des doutes ?Dans le cas contraire, l'exécutif a au minimum pêché par naïveté, et c'est déjàune faute politique.La droite, qui a, elle aussi, quelques affaires sur le feu. Bettencourt,Karachi, les sondages de l'Elysée, il faut que tout le monde se remette encause, met en garde l'ancien ministre UMP, Laurent Wauquiez : "Jepense que cela doit être un message pour nous tous, à gauche comme àdroite, pour clarifier notre rapport avec l'argent. C'est une question pourtous les partis politiques. "Pendant ce temps, les populistes prennent la poseEnspectateurs impuissants, disent-ils, des turpitudes du système. "On a l'impressionqu'un scénario se déroule. Monsieur Cahuzac fait des aveux, il s'excuse. On estdans le théâtre politique. Il est temps de redonner une honnêteté au systèmepolitique français et je ne pense pas très honnêtement que ce soit la gauche duPS ou la droite UMP Sarkozy qui pourra demain refaire un système politiquedigne de ce nom ", déclare Louis Aliot, vice-président du Front National.Le "tous pourris" qui gagne du terrain, premièreconséquence d'un tremblement de terre dont les répliques seront certainementmultiples, et violentes.