Ça passe ou ça casse pour François Hollande
Imaginez François Hollande se
déplaçant tel le funambule sur son fil au-dessus du vide. Nous retenons notre
souffle. Mais la politique, ce n'est pas du cirque, même si le président fait
parfois preuve de talents de prestidigitateur. Tout le monde s'attendait à ce
qu'il perde ce pari d'inverser la courbe du chômage avant la fin de l'année,
lancé... le 9 septembre 2012 sur le plateau de TF1, il y a plus d'un an ! Le
suspense était total, surtout après ce qui a été interprété comme une bourde hier
matin, volontaire ou pas, quand il a lâché en visite à Aubervilliers :
"La bataille se fera mois par mois". Tout le monde a compris :
ça y est, son pari est perdu. Les commentaires sont allés bon train, malgré les
rectificatifs des conseillers élyséens. Son succès n'en a été que plus éclatant
en fin de journée quand le - 0,6% magique est sorti du chapeau. Une
précision : les chiffres du chômage, affirme une source au ministère du
Travail, sont connus huit jours à l'avance.
Le gouvernement a mis le paquet pour obtenir ce
résultat ?
Les stratèges de l'Elysée et
du ministère du travail ont fait gros sur les contrats d'avenir, qui ont permis
d'agir sur le chômage des jeunes. Les préfets étaient sous tension dans les
régions. Et ça passe ! Même si la baisse des chômeurs de la catégorie A,
ceux qui n'ont pas d'emploi, s'accompagne d'une hausse des catégories, B et C :
les petits CDD, les longues durées, les séniors dégustent.
Alors, ça baisse ou ça monte ?
Les deux, mais comme ça
baisse d'un côté, finalement peu importe si ça monte de l'autre. Vous n'y
comprenez rien ? Ce n'est pas grave, l'important pour le chef de l'Etat
était de présenter une décrue. "Bravo l'artiste ", a ironisé Xavier
Bertrand l'ancien ministre UMP du travail, inquiet toutefois de la
multiplication des plans sociaux qui se profilent dans les mois qui viennent,
les Mory Ducros, Redoute et autres Fagor-Brandt. De plus, les emplois aidés par
définition coûtent cher et ne sont pas pérennes. La partie est loin d'être
gagnée. Mais une baisse représente une lueur d'espoir.
L'Elysée a quand même le triomphe modeste...
"La courbe inversée,
c'est vrai que ça fait un peu sourire. Les gens doivent se dire :
François, faut pas nous la faire", reconnaît un proche du président, qui
ajoute : "L'inversion est quand même là. Ce sera du solide si ça
dure quelques mois. Nous verrons fin janvier, avec le bilan de 2013. Si ça
baisse toujours, un petit brin de confiance pourra renaitre" . Les
commentaires sont prudents. Il est vrai que le bug SFR du mois d'août qui avait
fait baisser artificiellement le chômage a sonné le glas de chiffres auxquels
plus personne ne croit vraiment, comme ceux de la délinquance. Même si ça passe
de justesse, tout cela reste fragile.
Et le président aura le regard tourné vers la Bretagne
demain.
Et là, il ne faut pas que ça
casse. La dernière grande mobilisation des Bonnets rouges à Carhaix va faire
figure de test. Comme du temps du mariage pour tous. Le gouvernement parie sur
un essoufflement du mouvement, qui viendrait s'ajouter au moins zéro 6 d'hier.
François Hollande, patient, adepte du long terme, n'a cesse de se dire, en
équilibre sur le fil : jusqu'ici, ça passe.
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