C'est à Marseille que Bernard Tapie était devenu populaireet qu'il avait lancé sa carrière politique dans les années 80. C'est aussi là qu'ilavait chuté, après l'affaire OM-Valenciennes dans les années 90. C'est toujourslà, deux décennies plus tard que Bernard Tapie veut faire son retour, enmettant la main sur les derniers titres de presse du groupe Hersant, dont LaProvence , "le" journal de Marseille grâce à une (petite) partie des285 millions d'euros que lui a versé l'Etat dans l'affaire du Crédit Lyonnais."On connaît les pratiques de Bernard Tapie, alors on s'inquiète. On sait qu'il fait cela parce qu'il a des visées politiques et qu'il veut probablement se présenter à la mairie "Mais déjà, le soupçon guette : la presse n'étant pas unsecteur très en forme. Alors nombreux sont ceux qui doutent de ses réellesintentions. Bernard Tapie, plutôt que pour faire de l'argent, n'est-il pasrevenu à Marseille avec la mairie en ligne de mire, pour 2014 ? PourPatrick Menucci, député-maire socialistedu 1er arrondissement de la ville et candidat aux prochaines municipales, celane fait aucun doute : "On connaît les pratiques deBernard Tapie, alors on s'inquiète. On sait qu'il fait cela parce qu'il a desvisées politiques et qu'il veut probablement se présenter à la mairie ",s'indigne-t-il.Patrick Menucci n'est pas le seul à s'inquiéter : ladroite marseillaise, elle aussi, voit d'un mauvais œil l'arrivée de l'encombranthomme d'affaire. Notamment l'un des candidats à la succession de Jean-ClaudeGaudin, le député UMP Guy Teissier. "Connaissant un peu Bernard Tapie,je sais que c'est un as de la vente à la découpe. J'espère que l'Etat aura bienvérifié qu'il y aura bien un plan de redressement industriel : c'est unegrosse entreprise pour Marseille..." , prévient l'ancien adversairepolitique de Bernard Tapie.En somme, Bernard Tapie semble être un problème pour tout lemonde, tant pour la droite que pour les socialistes. Parce qu'avec la conquêtede Marseille, ces derniers comptaient aussi affaiblir Jean-Noël Guérini, l'undes leurs, le patron tout puissant du département, menacé par d'autresaffaires. C'est dire si le retour de Bernard Tapie est donc un dossier pristrès au sérieux, bien au-delà de la chasse-gardée marseillaise. Jusqu'à l'Elysée,même : remporter le trophée marseillais sera pour les socialistes un grandchelem Paris – Lyon – Marseille qui masquerait largement leurs autres défaites.Dans les colonnes du Canard enchainé, on murmure même que l'Elysée seraitintervenu pour tenter (-sans succès-) de barrer la route à Bernard Tapie."La priorité est d'assurer une pérennité à ces journaux : on ne doit pas être dans des horizons électoraux mais dans une perspective industrielle""La priorité est d'assurer une pérennité à cesjournaux : on ne doit pas être dans des horizons électoraux mais dans une perspectiveindustrielle. Tant pour les salariés qu'au nom de la liberté de la presseet de l'information" , estimait la ministre de la Communication, AurélieFilippetti, au moment de la première tentative de l'homme d'affaires pourrafler ces journaux du sud, il y a quinze jours.Une odeur d'année 80 flotterait donc, avec un arrière-goûtde déjà vu. On parle même du retour de l'avocat Jean-Louis Borloo pour épaulerBernard Tapie. Une vieille amitié. Immédiatement démentie par le vice-présidentdu parti de Jean-Louis Borloo, le député UDI Yves Jégo : "Il y ena qui ont beaucoup d'imagination... Effectivement, il a été son avocat. Mais il n'estni mêlé ni intéressé, de près ou de loin, aux investissements de Bernard Tapie.Quant aux municipales, nous soutiendrons évidemment Jean-Claude Gaudin."Bernard Tapie, lui, a qualifié de"triple-connerie " ses visées sur la mairie de Marseille. Il y a moinsde quinze jours, il avait aussi dit qu'il jetait l'éponge pour la reprise de LaProvence : il ne faut jamais croire Bernard Tapie sur parole.