Bercy, la cohabitation impossible
Mon premier mise sur l'interventionnisme étatique, mon
second est un social-réformiste, mon tout ne fonctionne pas.
Arnaud Montebourg et Pierre Moscovici ont déjà eu l'occasion
de s'affronter, de monter sur leurs egos et par conséquent de faire vaciller un
ministère-clé et de brouiller le message économique et industriel du
gouvernement.
Parmi les polémiques et les affrontements : la gestion de
PSA, la nationalisation de Florange, le contrôle de la Banque Publique
d'Investissement, l'orientation libérale des services du ministère, le débat
sur l'austérité.
Une fausse complicité
Les deux hommes ont souvent mis en scène, pour la photo,
leur pseudo-complicité. Une complicité de façade et la façade s'est écroulée hier
dans la cour de l'Elysée.
Arnaud Montebourg devant micros et caméras en défenseur du
"made in France" : "Le gouvernement fait son travail. Il y
a un réflexe économique et d'intelligence stratégique. Cette décision a été
prise en relation avec Pierre Moscovici et moi-même. "
Pierre Moscovici, lui, réagit quelques minutes plus tard
loin de l'Elysée. Il lâche son collègue et se range du côté des patrons : "Il
n'y a pas eu de décision conjointe. Ce qui est clair c'est que le président de
la République a réuni les assises de l'entreprenariat et a voulu donner un
signal. L'acte d'entreprendre doit être encouragé. Rien ne doit venir le
contredire. "
Arnaud Montebourg encouragé
François Hollande et Jean-Marc Ayrault se sont fait discrets
publiquement mais ont plutôt encouragé la démarche de Montebourg.
Selon les informations recueillies par Marie-Eve Malouines,
chef du service politique, le ministre du Redressement productif est dans la
ligne du gouvernement sur ce dossier, en gros le sauvetage d'une entreprise
française. Et le ministre de l'économie, "en a fait un peu trop ".
Cela dit, toujours cette source à Matignon, le Premier
ministre reconnaît quand même qu'il y a un problème de méthode chez Montebourg.
Il agit souvent seul sans concertation. D'où ces commentaires dans l'entourage
de Moscovici et Fleur Pellerin : "Il est perso, hallucinant et
ingérable ".
L'Elysée soutient Montebourg
En début de semaine, il y avait eu cette opération de
"câlinothérapie" auprès des patrons et l'annonce d'un plan de soutien
aux entrepreneurs. Pour beaucoup d'entre eux, l'affaire Dailymotion est un
mauvais signal.
Ces critiques sont nuancées par un conseiller du Président :
"Pas de contradiction entre lundi et aujourd'hui, les intérêts d'une
société française sont préservés, cela ne va pas à l'encontre des mesures
annoncées, " dit-il.
A deux jours d'une manifestation de gauche, sous l'impulsion
de Mélenchon, montrer que l'Etat agit et ose, après les échecs Florange et
Pétroplus, c'est une carte que François Hollande ne pouvait pas ne pas jouer.
L'opposition en profite
L'opposition, pour sa part, a sauté sur l'occasion, sur ce
énième couac, pour dénoncer le zigzag de la politique économique du
gouvernement.
La députée UMP Nathalie Kosziusko-Morizet invitée de France
Info : "C'est aussi un problème pour tout le monde de l'entreprise,
pour tout le monde économique, parce que c'est encore une affaire où tous les
journaux étrangers, les pages investisseurs, vont dire qu'en France on n'est
pas dans une économie libre, c'est le gouvernement qui décide qui fait
partenariat avec qui. "
La rumeur d'un remaniement relancée
Cette nouvelle polémique relance les rumeurs sur un découpage
plus simple de Bercy. Il y a, à ce jour, six ministres et ministres délégués. Cela
relance aussi les rumeurs sur un remaniement. Mais où caser Montebourg ? Que
faire de Moscovici ?
Montebourg, qui profite de son poids politique au sein du PS
depuis la primaire, mis à la porte, ce serait lui donner encore plus de liberté
et donc de nocivité politique pour le chef de l'Etat.
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