Consommation : "Les Français sont revenus massivement dans les magasins", explique le délégué général de la Fédération des acteurs du commerce dans les Territoires

Malgré l'inflation, les commerces ont enregistré des hausses de fréquentation, que ce soit dans les centres-villes ou les centres commerciaux de périphérie. Christophe Noël, délégué général de la FACT, la Fédération des acteurs du commerce dans les Territoires, commente ces résultats dans l'Invité éco de franceinfo.
Article rédigé par Camille Revel
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7 min
Christophe Noël, délégué général de la FACT. (RADIOFRANCE)

Dans l’ensemble des sites commerciaux, la fréquentation a nettement progressé en 2023. Les centres-villes ont enregistré une fréquentation en vive hausse de 11%. Les zones commerciales de périphérie ont vu leur fréquentation croître de 5,7% en moyenne et les centres commerciaux de presque 2%. Christophe Noël, délégué général de la FACT, la Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires, vient nous faire part de son analyse.

franceinfo : Nous parlons consommation, commerce, centres commerciaux. Avant de se projeter sur 2024, quel bilan vous tirez pour les commerces de cette année 2023 dans le contexte français marqué par l'inflation ?

Christophe Noël : L'année 2023 a été une très bonne année en termes de fréquentation des centres commerciaux, quelle que soit leur typologie, mais particulièrement dans les centres-villes des villes françaises. Et ça, c'est une bonne nouvelle, au moment où tout le monde cherche à revitaliser le commerce dans les centres-villes.

On a connu la période du Covid. Aujourd'hui, les Français plébiscitent les centres commerciaux et notamment les zones commerciales. Y a-t-il une prime à la taille ?

Les zones commerciales tirent leur succès aussi du développement d'une offre de discount. Ces zones commerciales de périphérie connaissent des taux de vacance très bas. Et puis, c'est vrai que les Français sont revenus massivement dans les magasins, c'est attesté par le fait que la vente de biens sur internet, depuis deux ans dans notre pays, décline, avec -7% en 2022, -1,8% en 2023. Cette croissance de la consommation se fait donc dans les magasins.

La composition des dépenses des Français a-t-elle changé ?

Les Français dépensent de façon très différente, si on compare à la période de l'avant-Covid. Les défaillances, les difficultés du secteur du prêt-à-porter et de la chaussure attestent bien du fait que les Français privilégient la seconde main, l'achat sur Internet. Donc la concurrence est très dure et les gens dépensent moins. En revanche, ça progresse pour tout ce qui va toucher à la beauté, à la santé, aux articles de sport et encore plus à la restauration, qui est vraiment le secteur qui tire aujourd'hui les dépenses de consommation - et les emplois - dans le commerce.

Vous écrivez que les ménages français dépensent en moyenne 2 000 euros de plus en 2023 qu'en 2019, avec tous les critères pris en compte, en plus de l'inflation. Y a-t-il des régions particulières qui voient une fréquentation en hausse ?

Oui, il y a des petites différences entre les régions. Pour les centres commerciaux, c'est l'Ile-de-France qui se distingue, avec 4% de croissance des flux en 2023. Mais ça s'explique aussi par le fait qu'il y a une surreprésentation des grands centres commerciaux. Tout à l'heure, vous parliez de la prime à la taille. C'est très marquant pour les centres commerciaux, mais je crois que ça l'est aussi pour les centres-villes. Plus un site commercial a une capacité à proposer une offre diversifiée, notamment avec une offre de loisirs, de restauration, de services à la personne, plus il est attractif et donne des raisons aux Français de se déplacer. C'est vraiment l'enjeu des sites commerciaux demain que d'arriver à accueillir cette offre.

Pour embellir les zones urbaines de périphérie, le gouvernement a lancé un plan de transformation de 24 millions d'euros. Vous à votre échelle, que pouvez-vous faire ?

Les acteurs du commerce détiennent beaucoup de foncier en entrée de ville. Ce sont des fonciers qui répondent à une logique urbaine, qui est celle de la France des Trente Glorieuses, dans laquelle on imaginait juxtaposer à l'horizontale des fonctions diverses, qu'on desservait par l'automobile. Ces temps sont heureusement révolus. Tout le monde aujourd'hui a en tête de reconstruire la ville, en évitant d'artificialiser de nouvelles terres et donc en utilisant des fonciers déjà exploités. Et j'espère qu'on va voir se développer dans les années et même des décennies qui viennent - ça prendra beaucoup de temps - des projets plus denses pour une ville plus mixte. Avec des usages variés. On va trouver des nouveaux quartiers en fait, dans ces périphéries.

Et vous, que faites-vous pour la transition écologique de votre secteur ? Est-ce une question à laquelle la FACT réfléchit ?

La transition écologique est vraiment au cœur de nos sujets. C'est la raison pour laquelle beaucoup d'adhérents d'ailleurs viennent chez nous. Pour justement travailler ensemble à des sujets qui sont compliqués à appréhender. Depuis la construction d'un bâtiment, de façon plus vertueuse, jusqu'à la question de l'offre qu'on propose dans les commerces, on se demande comment nos adhérents, avec les enseignes évidemment, qui sont les principaux moteurs de tout ça, peuvent aider à accompagner les Français vers une consommation plus durable. Quelle place peut-on faire à la seconde main par exemple ? Quelle place fait-on aussi aux activités expérientielles, notamment dans la restauration et les loisirs ?

Avez-vous des montants d'investissement, des objectifs ?

Non, je suis incapable de consolider un montant. On parle évidemment de très nombreux projets qui vont représenter des investissements considérables. Mais pour ça, les acteurs du privé ne peuvent pas être seuls. Ils doivent travailler en collaboration très étroite avec les élus. Et les élus se sont beaucoup intéressés à ce qui se passait dans le cœur des villes, à juste titre. Il y avait vraiment, en particulier dans les villes moyennes, un sujet de préoccupation. Ils doivent maintenant continuer à développer tout en répondant aux besoins de leur population, que ce soit pour accueillir de l'emploi ou des logements. Et le faire en utilisant justement ces fonciers qui sont déjà artificialisés et dont certains sont effectivement détenus par nos adhérents.

Êtes-vous suffisamment accompagnés par l'État ?

Il y a eu une impulsion très forte lancée en septembre dernier par les ministres Christophe Béchu et Olivia Grégoire, avec l'idée justement d'activer de nouveaux outils pour faciliter la transformation de ces entrées de ville. C'était indispensable parce qu'il y a des sujets réglementaires. Comment autoriser ce type de projets, qui sont compliqués ? On a changé de logiciel sur l'urbanisme en France, en faisant maintenant du multifonctionnel. Il faut ainsi modifier les plans d'urbanisme. Et encore une fois, rien ne peut se faire sans un engagement très fort des élus. Mais l'élan a été donné par l'État.

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