"Cette année encore, il devrait y avoir des augmentations de salaires", assure Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des DRH

Avec l’inflation qui s’installe, l’année qui commence sera marquée par de nouvelles hausses de salaires, selon Benoit Serre, vice-président de l’Association nationale des DRH (ANDRH). Il est l'invité éco de franceinfo, mercredi.
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Benoît Serre (franceinfo)

Quelle rentrée pour les entreprises et leurs salariés ? L'inflation sur les prix dans l'alimentation frise les 13%, et depuis 15 ans la consommation dans ce secteur est au plus bas. Selon Benoît Serre, les entreprises ne peuvent qu'accompagner les salaires à la hausse. Il est vice-président de l’ANDRH (Association nationale des DRH), et a occupé ce poste au sein de Leroy Merlin, la Macif et L’Oréal France.

franceinfo : Vous l'avez constaté comme nous, l'inflation se maintient à un niveau élevé dans l'alimentaire, à plus de 12,5 % sur un an. Faut-il augmenter les salaires pour tenir compte de cette hausse des prix qui s'installe ?

Benoit Serre : C'est une inflation un peu différente de celle qu'on a connue l'an dernier, qui était une inflation beaucoup fondée sur l'énergie. Là, je dirais que c'est de l'inflation du quotidien. Donc la pression sur les salaires, indépendamment des débats syndicaux habituels, va être relativement forte, même si sur 2022, les entreprises ont en moyenne augmenté les salaires de 4,5%. C'est inférieur à l'inflation, mais c'est quand même un taux très élevé par rapport aux années précédentes. Il y a un effet de rattrapage.

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On sait aussi que l'écart rémunération-inflation se couvre sur deux années. Donc il est probable que cette année, les évolutions de rémunération devraient être à peu près dans les mêmes eaux, de 4 ou 4,5%. Mais il ne faut pas perdre de vue que beaucoup d'entreprises, notamment des PME, sont en même temps en train de lancer le remboursement des PGE [prêts garantis par l’Etat]. C'est vrai que ça exige un calcul qui a été un tout petit peu plus complexe en 2023 qu'il ne l'a été en 2022.

Il faudra, à votre avis, qu’il y ait de vraies hausses de salaires, pérennes, et pas des augmentations de rémunération sous forme de primes par exemple ?

Vous avez raison. C'est-à-dire que quand vous êtes en négociation, vous avez la rémunération dont tout le monde parle, le fameux taux dont tout le monde parle. Mais vous avez tout ce qu'il y a autour. La prime Macron sera-t-elle reconduite ? Probablement. Vous avez aussi des tas d'autres choses. Par exemple l'augmentation de la prise en charge du forfait transport, des augmentations d'aide ou des conditions de protection sociale plus avantageuses. Mais c'est vrai que le débat, tant pour les salariés que pour les employeurs, se concentre sur les salaires parce que c'est ça qui fait évoluer votre masse salariale. L'avantage de systèmes comme la prime Macron, c'est que si c'est un "one shot", ça pèse moins lourd sur les finances à long terme.

Autre actualité, en cette rentrée, c'est la réforme des retraites. Elle entre en application ce vendredi 1er septembre, avec un recul progressif de 62 à 64 ans. Comment ça se passe concrètement dans les entreprises, pour ces salariés qui vont devoir travailler quelques mois de plus ? Est-ce qu'ils travaillent quelques mois de plus réellement ?

Le sujet, c'est que nous avons des gens qui avaient prévu de partir. Pas tellement ceux pour qui ça rajoute un mois ou deux mois, ce n'est pas très grave. Mais pour ceux qui se voient rajouter un an ou un an et demi, il y a plusieurs types de problèmes. Le premier problème, c'est quand les gens sont sur des métiers pénibles. Ils vous disent qu'ils ne vont pas pouvoir faire un an et demi de plus. Déjà, ils avaient du mal à aller jusqu'au bout, là, ils vont avoir encore plus de mal.

Comment gérez-vous ça ?

Tout d'abord, il faut les réintégrer dans les process normaux de gestion de carrière. La réforme des retraites porte aussi une revalorisation du coût pour l'entreprise de ce qu'on appelle les ruptures conventionnelles individuelles. C'est une politique en faveur de l'emploi des seniors. Malheureusement, je ne suis pas sûr que c'était la meilleure des idées. Et puis, l'autre sujet, c'est de repenser l'organisation en intégrant des gens qui vont rester un an et demi de plus, alors qu'on avait peut-être programmé qu'ils partiraient plus tôt.

Puis il y a la dernière catégorie, ce sont les gens qui étaient en pré-retraite, ce qu'on appelle les congés de fin de carrière. Ceux-ci vont se prolonger, ce qui représente un coût supplémentaire pour les entreprises. La date de départ en retraite se décalant, cela engendra un coût supplémentaire pour les entreprises. Mais on le fera !

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