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Hervé Ghesquière, 547 jours chez les "fous", en Afghanistan

Dans un livre, le journaliste raconte sa captivité chez les talibans aux côtés de son collègue Stéphane Taponier et leur traducteur Reza. Il donne dans cet ouvrage sa "part de vérité".
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Franceinfo (Franceinfo)

Hervé Ghesquière raconte son expérience en détails, et d'abord son enlèvement : le 30 décembre 2009, le grand reporter de France 3 roule dans la vallée de Kapisa. Il n'est pas seul. Le journaliste caméraman Stephane Taponier l'accompagne, et aussi leur traducteur, Reza. Dans un village, un homme pointe sur eux sa kalachnikov. D'autres combattants surgissent. Ils montent à bord. Il a suffi d'un instant. Taponier se tourne vers Ghesquière et lui lance : "Joyeux Noël". La prise d'otages vient de commencer. Elle va durer 547 jours.

Très vite, Hervé Ghesquière est épuisé. Les talibans obligent leurs otages à se déplacer, sans arrêt, d'un village à un autre. Puis ils les séparent. A chaque étape, le journaliste découvre une nouvelle prison, en général une petite pièce, chez un habitant. Il a froid. Il doit négocier une couverture crasseuse. Tout est sale. Un jour, en entrant dans une cellule, il entend un bourdonnement énorme. Au plafond, il découvre une masse noire grouillante. Des centaines de mouches sont agglutinées. Le journaliste va pourtant dormir là, au milieu des insectes. En vingt-quatre heures, il réussit quand même à en écraser 180. Il compte les cadavres de mouches. "Ca passe le temps" , dit-il. Hervé Ghesquière a faim, aussi. Il reçoit un bout de pain, un peu de riz, quelques miettes de fromage, un oeuf de temps en temps. Il maigrit à vue d'oeil.

Certains geôliers sont presque aimables. D'autres sont des brutes. Un jour, un gardien sort son téléphone portable. Il montre au journaliste de petites vidéos de propagande : des adolescents kamikazes poseurs de bombe, une voiture qui explose, et, le clou du spectacle, des égorgements. Hervé Ghesquière a l'impression de vivre chez les "fous" .

Parfois, l'otage est à bout. Il éclate en sanglots. Il crie. Il est désespéré. Puis il reprend espoir. Il obtient un petit poste de radio. Il réussit à capter une émission musicale sur la chaîne Voice of America. Un réconfort, dans la nuit afghane. Une après-midi, sur la BBC, Hervé Ghesquière entend la voix d'Ingrid Betancourt. L'ancienne prisonnière des FARC, en Colombie, rappelle qu'elle a été détenue six ans et demi. Pour le Français, c'est un choc, et un encouragement. Si elle a tenu, il peut y arriver également.

Dans son livre, Hervé Ghesquière raconte beaucoup d'autres souvenirs encore : le moment où il retrouve ses compagnons, leur libération, son rendez-vous avec Nicolas Sarkozy, quelques semaines après. L'otage n'a pas digéré les critiques des militaires et du gouvernement. Non, dit-il, les journalistes n'ont pas été irresponsables, ils n'ont pas pris de risques inutiles. Ils ont fait leur métier.

Le livre d'Hervé Ghesquière, "547 jours", paraît chez Albin Michel.

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