En Afghanistan, la guerre inattendue des talibans contre l'opium
Ils l'encouragent, même. Car le pavot, c'est l'opium. Et l'opium, c'est l'héroïne. Le trafic de drogue fait vivre les paysans, et il finance le combat des talibans : selon l'ONU, cette année, le pavot va encore leur rapporter 700 millions de dollars - environ 550 millions d'euros. Les islamistes ont besoin de cet argent. D'ailleurs, ils adaptent leurs offensives au calendrier des récoltes : parfois, ils repoussent une attaque pour laisser travailler les paysans.
Les choses commencent à changer. Le journal The Guardian décrit la scène ce matin : il y a quelques jours, dans la province de Kunar, un chef taliban, Zia Al-Rahman, exige que les habitants arrêtent de cultiver le pavot. Il envoie des combattants dans les villages pour détruire les cultures. Un groupe de talibans se présente devant deux femmes, deux veuves qui plaident leur cause ; elles ont besoin de l'opium pour nourrir leur famille. Mais Zia Al-Rahman se met en colère. Pas de quartier. Il exige la destruction de ces champs de pavot.
Pourquoi ? Parce que la culture de la drogue est contraire à l'islam. Cette règle, les talibans l'avaient déjà appliquée il y a plus de dix ans, quand ils étaient au pouvoir. Sous leur règne, l'opium avait reculé. S'ils reprennent aujourd'hui ce combat contre le pavot, c'est sûrement pour des raisons d'image, pour rivaliser avec le gouvernement afghan : les autorités essaient d'éradiquer l'opium, poussé par la communauté internationale. Face au gouvernement de Kaboul, les talibans veulent donc montrer qu'ils appliquent strictement leur religion.
Il faut relativiser ce changement. Les destructions de pavot restent marginales. Le journal The Guardian explique d'ailleurs que si elles ont lieu dans l'est du pays, ce n'est pas par hasard : dans cette région, la culture de la drogue rapporte moins que dans le sud, par exemple. Surtout, la tâche est immense. Quelques hectares de pavot qui disparaissent, c'est une goutte d'eau. Aujourd'hui encore, l'Afghanistan produit 90% de l'opium consommé dans le monde.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.