L'étoile du jour. Un ancien ouvrier de Continental devenu… sculpteur !
Pendant huit ans, il s'est battu pour ses collègues de l'usine Continental de Clairoix qui a fermé. Puis est venue l'heure de tirer un trait. Après 25 ans à confectionner des pneus, Pierre Sommé s'est tourné vers l'artisanat d'art.
Il s’appelle Pierre Sommé, il a 53 ans, et c’est un ex-Continental. Il était délégué syndical en 2009, lorsque le groupe de fabrication de pneus a décidé de fermer son usine de Clairoix dans l’Oise, et de licencier ses 1 113 salariés. Plus discret que l’autre grande voix, Xavier Matthieu, Pierre Sommé a toujours été là, avec sa gouaille et son sourire, du début à la fin, à s’occuper de chaque Conti, de procès en procès, huit années durant. Alors que les autres partaient en formation, lui, restait au local syndical, pour épauler, conseiller, réconforter aussi. "Je n’avais pas le temps de réfléchir à ma reconversion, dit-il, si je le faisais, tout s’arrêtait… quant à baisser les bras, impossible, parce que si tu baisses les bras, t’es mort."
Et ce n’est pas juste une façon de parler. En 2017, quand le dernier dossier a été refermé, Pierre Sommé a fait les comptes : sur 1 113 salariés, plus de 300 divorces et 14 suicides. Une catastrophe. Alors que faire après ? Une fois une telle épreuve passée ?
Plus de hiérarchie, plus de pointeuse, plus de planning
Et bien oser. Oser faire ce qui paraît déraisonnable, irréaliste. Après 25 ans à confectionner des pneus, Pierre Sommé a commencé à sculpter, à travailler le bois, puis le métal, le cuivre, le fer. Il s'est mis à forger des visages, des silhouettes, en s’inspirant de ceux qu’il admire : Matisse, Modigliani, Cocteau. Et il est heureux, "parce que c’est moi qui crée, dit-il, je pars avec de la matière brute, sans forme, et j’en sors avec ma création. C’est avec mon imagination que je négocie." Il reconnaît que, parfois, l’imagination, la créativité, c’est capricieux, mais c’est sans comparaison possible avec le fait de travailler à la chaîne les mêmes pneus, avec les mêmes moules, le même plan de montage. Là, plus de hiérarchie, plus de pointeuse, plus de planning. Pierre Sommé est son propre patron, même s’il trouve que l’expression la plus adaptée, ce serait plutôt "créateur, artisan d’art". Pour présenter son travail, il a ouvert un compte Instagram, intégré un collectif d’artistes et il expose désormais ses œuvres à la galerie Hugues-Capet à Noyon, dans l’Oise. Comme quoi lorsqu’on a vraiment des mains d’or, non seulement on peut travailler encore, mais surtout autrement et même plus beau encore.
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