Pour qui roulent les Verts?
L'affaire est grave, puisqu'elle justifie une prise de position du
quotidien Le Monde . Le journal du soir réclame la démission des
ministres verts du gouvernement Ayrault. L'éditorial est acide : il accuse
les écologistes de se comporter en groupuscule irresponsable, d'être au cœur
d'un jeu de dupes. Ils se comportent comme s'ils pesaient 10%, alors qu'ils
n'ont recueilli que 2% à la présidentielle. François Hollande doit mettre fin à
leurs fonctions, sermonne l'éditorial du Monde, ils reviendront si leur
formation se transforme en parti de gouvernement.
C'est vraiment une leçon de politique qui est administrée par cet
édito du Monde. Ce n'est pas si courant.
L'édito est aussi vigoureux que la position des Verts est ambiguë.
Ils ne veulent surtout pas créer un clash au sein de la majorité. Ils
prétendent contredire le gouvernement, sans pour autant le désavouer. C'est
assez subtil. Les Verts voteraient contre le traité de stabilité, signé par
Nicolas Sarkozy, impossible à modifier, et pour la loi sur la solidarité,
concoctée par le gouvernement Ayrault et qui autorise des évolutions. Derrière
cette subtilité, réside une volonté politique assez facile à comprendre, les Verts veulent faire entendre leur petite musique au sein de la majorité.
Mais cette petite musique est-elle indispensable ?
Les Verts en semblent convaincus en tout cas. L'ambiguïté de leur
posture l'impose. Les Verts existent au sein de la majorité grâce à la bonne
volonté du PS. L'accord électoral conclu avec le parti de Martine Aubry leur a
permis de siéger au gouvernement, et d'obtenir une vraie structure, un groupe
constitué à l'Assemblée. Mais la portée de cette performance électorale est
relativisée par le score du PS lui-même. Les socialistes disposent de la
majorité absolue à l'Assemblée. Au quotidien, le vote des écologistes n'est
jamais indispensable, sur le plan arithmétique. Il l'est bien sûr, sur le plan
symbolique. Et c'est tout le problème des Verts dans cette majorité, ils
défendent beaucoup leur image politique, symbolique. Ne pas voter le traité,
dénoncer son aspect techno, ignorer la réorientation plaidée par François
Hollande, c'est continuer d'incarner une branche exigeante de la gauche.
Le problème, c'est que leur attitude n'est pas forcément ressentie
comme exigeante, mais comme immature politiquement.
La
posture des Verts ne consolide pas leur position sur la scène politique. Outre
l'édito acerbe du Monde, les écologistes s'exposent, et exposent toute la
majorité, aux quolibets de l'opposition qui pointent leur incohérence, et
réclame leur départ du gouvernement, avant de stigmatiser (c'est pour les
prochains jours) la faiblesse de François Hollande et Jean-Marc Ayrault. Il
sera difficile pour les écologistes de ne pas admettre qu'ils affaiblissent le
président et le Chef du gouvernement. La question pour eux, sera ensuite de
savoir si ce coup d'éclat est porté à leur profit ou à leur débit. Car quel est
le but de ce coup d'éclat ? Obliger François Hollande à reculer ? Peu
probable. Dénoncer sa versatilité, l'opposition de droite s'en charge, en
visant l'alternance. Sauf à parier que les écologistes visent le même but,
incarner une alternative après l'échec de François Hollande, 4 mois après leur
accession au pouvoir, la finalité de cette posture verte demeure équivoque.
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