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Gérard Depardieu : le révélateur

L'exil fiscal de Gérard Depardieu remet le clivage droite/gauche au cœur du débat politique. D'un coté les matraqueurs de gauche, de l'autre, les boucliers de droite.
Article rédigé par franceinfo
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Les représentants de l'opposition, ex-majorité, n'ont pas
oublié les déconvenues du bouclier fiscal version Sarkozy. A peine élu, le président UMP avait parié sur un choc de
croissance qu'une politique fiscale avantageuse aurait relancé.

La crise avait aussitôt coupé l'élan de ce paquet fiscal. Mais
Nicolas Sarkozy s'y était accroché contre vents et marées, en en faisant le
marqueur de sa politique. Le président sortant n'avait accepté de revenir sur ses
dispositions fiscales qu'en toute fin de mandat, à l'approche des élections.

Ce paquet fiscal était devenu un boulet, sous la forme d'un
bouclier fiscal que la gauche ne cessait de brandir comme la preuve d'une politique
uniquement destinée aux nantis, aux privilégiés.

Et l'argument avait
porté à gauche...

Oui, c'est vrai. La volonté de faire participer les plus riches à proportion
de leurs aptitudes est un marqueur de la politique de François Hollande. Il en a fait une référence, et presqu'une morale, que ses
ministres reprennent à tour de rôle depuis la tirade écrite de Gérard Depardieu
("Minable, vous avez dit minable, comme c'est minable ").

Tous s'efforcent d'expliquer que dans une période de crise
telle que la vit la France aujourd'hui, le fait de payer plus d'impôts, quand
on est plus riche, est une question de morale, voire même de patriotisme. L'argument porte si bien dans l'électorat de François
Hollande, que pendant la campagne électorale, alors que Nicolas Sarkozy s'apprête
à reprendre l'avantage, le candidat socialiste lui coupe l'herbe sous le pied
en proposant la super taxe de 75% sur les revenus dépassant le million d'euros.

La gauche est conquise, la droite outrée.

Et c'est François
Hollande qui est élu, et qui applique ce programme.

Avec une touche personnelle, qu'il a bien du mal à faire
entendre : certes, il augmente les impôts, mais de façon juste et
équitable. Ceux qui ont plus, donnent plus. Sur le papier, le principe est incontestable. En réalité, il
passe mal. François Hollande a du mal à convaincre.

Parce que la situation économique empire.

Parce que le cap fixé par le gouvernement ne parait pas très
rectiligne.

Ce qui pour manier un voilier est compréhensible, surtout
pour remonter le vent, mais qui, en politique, passe pour de l'improvisation
peu rassurante. François Hollande ne parvient pas à introduire la notion de
patriotisme fiscal dans le débat politique. D'une part, parce que la droite l'en empêche.

Avec la même constance que la gauche dénonçait le bouclier
fiscal, l'opposition de droite n'a de cesse de fustiger le matraquage fiscal commis
par la gauche au pouvoir.

François Hollande ne convainc pas, d'autre part, parce que
ni lui ni son gouvernement ne sont parvenus à redorer l'image du personnel politique.

L'apriori négatif sur l'incapacité du politique demeure. C'est ce soupçon qui permet à Gérard Depardieu de se draper
dans sa dignité de contribuable outragé, avec le soutien de la plupart des
responsables UMP. Et le débat sur l'impôt devient très simple, la gauche est
pour, la droite est contre.

Une simplification plus ennuyeuse pour la majorité que l'opposition. Car après le débat sur la nationalisation, elle ramène la
gauche au pouvoir aux mêmes postures que dans les années 80.  

D'où sans doute la prudence de François Hollande. Il " refuse
de blâmer
 " ceux qui partent, mais " salue le mérite  " de ceux
qui restent. Le président refuse de s'inscrire dans la polémique Depardieu,
trop réductrice, pour la morale politique qu'il tente d'incarner.

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