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"Fin de l'abondance" : Emmanuel Macron change de stratégie et cherche à préparer les esprits

En introduction du Conseil des ministres de rentrée, Emmanuel Macron a alerté sur "la fin de l'abondance, des évidences et de l'insouciance", mercredi.

Article rédigé par franceinfo, Jean-François Achilli
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Emmanuel Macron lors du Conseil des ministres à l'Elysée, le 24 août 2022. (MOHAMMED BADRA / POOL / AFP)

Emmanuel Macron, avec son discours sur la "fin de l’abondance" en introduction du Conseil des ministres de rentrée, mercredi 24 août, a voulu préparer les esprit à la vague qui se dresse au loin à l’horizon et qui vient rapidement. Un tsunami économique et social provoqué par l’effet combiné de la guerre en Ukraine et du péril climatique.

Emmanuel Macron, qui avait fait preuve d’optimisme avec son discours sur les jours meilleurs et "les jours heureux" au plus fort de la crise sanitaire, parce qu’elle devait forcément déboucher sur un regain d’activité et un rebond de croissance, change aujourd’hui de stratégie et cherche, en préparant les esprits au pire, à jouer la carte de l’unité nationale.

D’autres présidents l’ont fait avant lui : s’il n’arrive pas à réformer demain, c’est parce qu’il y aura eu face à lui le désordre mondial… Cette guerre de Poutine qui met à rude épreuve les économies européennes, même la plus puissante, celle de l’Allemagne.

D’où le ton volontairement anxiogène de son intervention en introduction du Conseil des ministres de rentrée, mercredi 24 août. L’inflation va durer – pas d’amélioration avant début 2023, prévient Bruno Le Maire. Une mise en garde utile si les mesures pouvoir d’achat restent des coups d’épée dans l’eau. Le président qui se voulait protecteur demande finalement de nouveaux efforts aux Français.

Changement de  ton 

Ce discours sur la fin de l’abondance – des biens, des matières premières, de l’eau –, sur la fin des évidences – comme celle de l’idée de démocratie – et la fin de l’insouciance vient refermer une séquence post-Covid plutôt confiante en l’avenir. L’objectif est de nous installer dans le temps long, d'en appeler à la responsabilité de chacun. Et de faire des citoyens des coconstructeurs de leur propre destin (c’est le sens de la création à venir du Conseil national de la refondation), et d’éventuels coresponsables en cas de panne sèche.

L’opposition réagit de manière virulente. Elle accuse le chef de l’Etat d’être déconnecté du réel, décalé vis-à-vis des millions de chômeurs et de précaires. Parce tout que le monde n’est pas dans l’abondance, ni dans l’insouciance.

Emmanuel Macron veut devancer un éventuel procès en légèreté ou en incapacité à prévoir et anticiper, et court-circuiter ces oppositions, avant qu’elles ne jettent de l’huile sur le feu de la colère sociale et ne poussent les gens dans la rue, quand viendront les difficultés de l’hiver, les possibles coupures de chauffage ou les grandes réformes qui divisent, assurance chômage et retraites.

Ce discours est peut-être enfin celui des illusions perdues. Parce qu’il marque également la fin de l’innocence, et de la croyance, à chaque élection, en un monde meilleur qui, contrairement à cette vague de tourments qui nous arrive dessus, semble s’éloigner toujours un peu plus loin derrière la ligne de l’horizon.

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