L'utilisation intensive du portable augmente le risque de tumeur
La responsable de l'étude Isabelle Baldi, et les autres membres de son équipe de l'Institut de santé publique de Bordeaux ne veulent toujours pas parler d'un lien de cause à effet. Une réticence scientifiquement justifiée.
Les chercheurs reconnaissent qu'ils ne peuvent pas affirmer que les téléphones portables sont bien la cause de l'apparition de ces tumeurs pour deux raisons principales :
Leur étude ne montre pas d'effet dose , autrement dit, elle ne montre pas que plus les heures passées au téléphone sont nombreuses, plus le risque de tumeurs augmentent. Elle montre juste un doublement du risque de tumeur dans le groupe des plus gros utilisateurs, ceux qui ont passé au moins quinze heure par mois (soit une demi-heure chaque jour pendant des années ou mêmes des décennies avec l'oreille vissée à leur appareil). Mais pour les autres groupes, on ne voit pas le risque augmenté à mesure qu'augmente le nombre des heures au téléphone. Or, mesurer un effet dose du risque est un argument massue pour faire le lien de cause à effet.
La deuxième raison, tient à la nature même de l'étude menée à Bordeaux : il s'agit d'une étude cas-témoin . C'est-à-dire que les chercheurs ont étudié deux groupes : l'un composé de malades (ici des personnes avec une tumeur au cerveau) et un autre groupe qui va servir de témoin et qui est constitué de personnes en bonne santé. L'étape suivante a été de retracer l'historique de l'utilisation du portable pour chaque participant. Dans les études cas-témoins, on fait appel à la mémoire des participants, c'est une première difficulté et surtout, les chercheurs ne sont pas dans un protocole expérimental dans lequel ils seraient maîtres de tous les éléments extérieurs qui peuvent provoquer la maladie. Ici, ils ont certes recueilli des informations sur les portables mais, ils n'ont pas d'éléments sur l'alimentation, le niveau de stress, l'activité physique des participants. Autant de causes potentielles qui peuvent potentiellement jouer un rôle dans l'apparition des tumeurs.
Interpréter les résultats
Pour mesurer leur importance, l'élément central est de connaître le contexte car l'étude de Bordeaux n'est pas la première du genre. Au moins deux groupes d'études (dont une partie menée en Suède) vont dans le même sens. Même si toutes souffrent des mêmes limites, une fois réunies elles font pencher la balance dans le même sens.
Les tumeurs du cerveau restent des tumeurs rares. Pour certaines d'entre elles, on recense à peine six cas pour 100.000 habitants. Donc même si le risque est multiplié par deux, comme dans l'étude de Bordeaux, cela reste un événement rare.
Les recommandations
Les scientifiques estiment qu'il est désormais temps de faire passer très clairement et très fermement ce message aux utilisateurs : limiter la durée de vos conversations, utiliser le kit main libre aussi souvent que possible, éviter de téléphoner dans les zones où le réseau n'est pas bon.
Pour les enfants, il faut éviter de les laisser devenir des utilisateurs compulsifs, éviter de les laisser dormir avec le portable sous l'oreiller. Une grosse étude internationale, MobiKids, est actuellement menée sur le cas des enfants et devrait être achevée en 2016.
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