Nanni Moretti remporte déjà la Palme de l'émotion
L'un a seduit, l'autre a déçu. C'est la dure loi du festival. Alors que le film de Nanni Moretti "Mia Madre" a ému la Croisette aux larmes, celui de Gus Van Sant "La Forêt des songes" a récolté quelques sifflets et huées dès les premières projections pour la presse. Les deux films pourtant creusent un même sillon. Ils mettent en scène des personnages confrontés à la mort d'un proche.
Dans La Forêt des songes , tout d'abord, Gus Van Sant embarque son personnage principal, incarné par Mattew Mac Conaughey dans une mystérieuse et immense forêt au Japon. Une forêt appelée "la forêt des suicides", car nombreux sont ceux qui viennent là mettre fin à leurs jours, à l'image donc de cet homme que l’on voit plonger au cœur de ce décor étonnant qui donne au film une vraie puissance dès les premières images.
Un décor que l'on quitte malheureusement trop souvent ensuite pour revenir en Amérique, au fil de flashbacks qui expliquent et surexpliquent ce qui l'a conduit à faire ce voyage. Ils racontent son couple, la lente déliquescence de son mariage, l'amour qui revient trop tard lorsque l'autre va disparaitre et ce voyage en forme de rédemption, accompagné d'une musique omniprésente, prend vite les allures d'un mélodrame trop larmoyant pour convaincre.
C’est forcement décevant de la part de Gus Van Sant qui avait obtenu la palme d’or en 2003 pour "Elephant ", c’est forcément décevant sur un sujet aussi fort qui a d'ailleurs touché la comédienne Naomie Watts qui joue dans ce film l'épouse de Mattew Mac Conaughey. Elle fait la joie des photographes sur la tapis rouge depuis le début du festival.
Ce sont exactement ces mêmes réflexions sur la mort des proches et les bouleversements qu'elles induisent, que propose Nanni Moretti dans "Mia Madre"
Au cœur du film de Nanni Moretti, il y a une femme cinéaste d'une cinquantaine d'années qui, en même temps qu'elle tourne son nouveau film avec beaucoup de doutes et de questionnements, et perd sa mère malade. C'est avec beaucoup de pudeur que Nanni Moretti filme cette tourmente. Il laisse la place à la douleur, mais aussi à l'humour. En laissant surgir la vie sans explications inutiles, il nous fait passer du rire aux larmes en même temps que son personnage.
Elle passe de son plateau de tournage où John Turturro en comédien capricieux livre de pures scènes comiques à l'hôpital où avec son frère, elle prend conscience, de tout ce qui, avec sa mère, va disparaître, de tout ce qu’elle a peut-être manqué. Pour Nanni Morreti, "c’est un film sur ceux qui restent entre nous les vivants, un film sur ce qui reste des personnes qui s’en vont : les livres, les cartons, les souvenirs."
La pudeur, dans ce film de Nani Moretti, passe aussi par une utilisation juste, parcimonieuse de la musique, des chansons qui viennent juste ponctuer quelques scènes de la vie quotidienne.
La voix de Jarvis Cocker notamment, que les festivaliers avaient encore en tête longtemps après la projection de ce film, qui d'ores et déjà a remporté la palme de l’émotion. Il sortira en salles au moins de décembre.
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