S'il est difficile de sortir un album majeur composéuniquement de matériau ancien, Bruce Springsteen évite néanmoins l'écueil del'objet fourre-tout, et donne, comme il le précise lui-même dans le livret del'album, "une maison et une oreille" à tous ces titres épars.Le chanteur précise qu'une personne lui a soufflé l'idée dece disque : Tom Morello. Dans une vie passée, ce dernier fut guitaristechez les très énervés Rage against the machine. Participant à la tournéeaustralienne de Springsteen, c'est lui, sa "muse" (selon lespropres termes du chanteur) qui l'a poussé à assembler ce album. Enretour, sa guitare figure sur une bonne partie des titres, en plus d' un duoavec le boss.Touchant et inégalSur plusieurs titres, les solos de guitare tendance hard rockaccordé à Morello ont tendance - au mieux- à alourdir la machine de guerre quereprésente déja un album de Springsteen, et - au pire - à lui donner un groscoup de vieux.L'ensemble du disque est heureusement suffisammentéclectique : quelques chansons plus douces, ou à la production plus sobre(Down in the Hole ) consolent de ce défaut de "grosse artillerie".Si la forme n'est pas toujours convaincante, le fond, luireste du Springsteen pur jus : parsemé de référence quasi bibliques etpatriotes, les meilleurs titres sont évidemment ceux qui donnent à voirl'amérique par les yeux du boss : 41 shots, titre écrit après la bavurepolicière qui causa, en 1999 à New-York, la mort d'Amadou Diallo, jeune immigréafricain. Harry's Place, ses gangsters et ses bars de nuits, ou encore The Wall,qui dresse le portrait d'un musicien croisé par Springsteen dans sa jeunesse,et qui n'est jamais revenu du Vietnam, un titre teinté du goût de Springsteenpour les contes de la plus pure tradition folk.Du mieuxCertains titres, enfin, trouvent une nouvelle vie, de laversion live à la version studio, réussissant ainsi à encapsuler une nouvelleénergie : un moment de communion quasi religieux boosté ici par des accents degospel (Heaven's Wall ), qui nous rappelle à quel point les concerts de BruceSpringsteen peuvent provoquer cette ferveur quasi-mystique.